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École des chartes » thèses » 2000

L’académie impériale des beaux-arts de Saint-Pétersbourg (1757-1802)

Du Moujik à l’artiste.


Introduction

Alors qu’au milieu du xviiie siècle la Russie est encore perçue comme une puissance barbare incapable de produire aucune forme d’art évolué, la situation est tout à fait différente au début du siècle suivant. Certains historiens français de la fin du XIX e siècle, tel Emile Veuclin, attribuèrent ce changement à l’influence bénéfique de la civilisation française. A l’inverse, les chercheurs soviétiques se sont attachés à démontrer les effets néfastes de la prépondérance française dans le processus d’enseignement de l’art en Russie. Tous étaient pourtant d’accord pour attribuer le mérite de la naissance de l’art moderne russe à l’Académie des beaux-arts de Saint-Pétersbourg.


Sources

Les archives de l’Académie des beaux-arts de Saint-Pétersbourg antérieures à 1917 sont conservées dans le fonds 789 des Archives historiques de l’Etat russe à Saint-Pétersbourg ; une partie de ce fonds a été publiée entre 1864 et 1866 par Piotr N. Petrov à l’occasion du centenaire de la réforme de Catherine II. Les Archives centrales des actes anciens de Russie, situées à Moscou, comprennent la correspondance privée des souverains russes, notamment celle de Catherine II avec Melchior Grimm. A Paris, les Archives nationales n’ont pu être d’un grand secours ; en revanche, les archives de l’Institut de France détiennent la correspondance extérieure de l’Académie royale d’architecture. Les Mémoires et documents, ainsi que la Correspondance politique, conservés aux archives du ministère des Affaires étrangères, ont livré des témoignages sur la situation de l’art en Russie au xviiie siècle.

Le musée de la Société archéologique et historique de la Charente, à Angoulême, possède un fonds de soixante-quatre dessins de Jean-Baptiste Vallin de La Mothe, qui a été complété par l’examen de cinq feuilles provenant de collections privées. Le musée de recherche scientifique de l’Académie des beaux-arts, situé à Saint-Pétersbourg, recèle une vaste collection de dessins, de tableaux, de sculptures et de maquettes d’architecture ; malgré sa richesse, ce fonds reste d’un accès difficile.


Première partie
Fondation


Chapitre premier
Le concept académique

Tentative de définition. ­ Née dans l’Italie humaniste du xve siècle, la première académie à vocation d’enseignement artistique fut Y Accademia del disegno de Florence. Tous les éléments qui définissent l’enseignement académique y étaient en place : le rôle central du dessin d’après le modèle vivant et l’affirmation du caractère intellectuel de l’activité artistique. Le xviie siècle vit le succès de ces théories en France dans un cadre institutionnel plus strict qui assura au modèle académique un rayonnement européen. L’enseignement, qui n’était pas le premier souci des fondateurs de l’Académie royale de peinture et sculpture, resta, malgré ce que l’on a pu penser, au second plan à Paris. Ce n’est pas le cas dans les nombreuses académies qui furent créées au xviiie siècle sur le modèle français.

Projets architecturaux. ­ Les premières réflexions sur le programme architectural d’école d’art sont élaborées par les concurrents des Concorsi Clementini de l’accademia de Saint-Luc en 1708 et 1732. Le modèle architectural est alors celui du palais privé. Cependant, les espaces pédagogiques prirent, avec le temps, une place grandissante par rapport aux espaces de représentation. Avec les projets de Piranèse et de Joseph-Marie Peyre, le modèle est dorénavant emprunté aux grands ensembles utilitaires de l’antiquité romaine. Dans la seconde moitié du xviiie siècle les architectes français et italiens disposèrent d’un vocabulaire spécifique à un tel programme inspiré du Panthéon romain : portique à colonne surmonté d’un fronton triangulaire, coupole surbaissée, emploi du cercle ou du demi-cercle dans la conception du plan. C’est à cette tradition que se rattache Vallin de La Mothe, l’auteur en 1763 du bâtiment de Saint-Pétersbourg, en rupture avec le projet d’Académie du Nord que son maître Jacques-François Blondel avait proposé six années auparavant.

Chapitre II
La situation en Russie au milieu du xviiie siècle

L’œuvre de Pierre le Grand. ­ Les réformes du premier empereur russe s’étaient étendues à tous les domaines, notamment à ceux de l’éducation et de la culture. Les premiers projets d’académie des beaux-arts naquirent sous son règne. Les difficultés que rencontra Pierre le Grand et la reprise en main des projets par l’Eglise entraînèrent leur échec momentané.

L’enseignement de l’art à Saint-Pétersbourg à la veille de la création de l’Académie. ­ En excluant le problème spécifique de la peinture d’icônes qui restait très vivante au xviiie siècle et au-delà des quelques rares ateliers privés qui étaient entretenus par les peintres employés par la Cour, certaines institutions dispensaient un enseignement scolaire de l’art avant 1757. L’Académie des sciences de Saint-Pétersbourg, fondée en 1725 et modifiée en 1747 en “ Académie des sciences et des beaux-arts ”, disposait d’une école de dessin. Cependant, seul le département de gravure fut maintenu avec succès tout au long du siècle, maintien justifié par les besoins éditoriaux de l’Académie des sciences, notamment dans son entreprise de cartographie de l’empire. Il s’agissait cependant de la forme la plus proche de ce qui sera mis en place à l’Académie des beaux-arts. En effet, si les grands établissements d’enseignement secondaire, comme le Corps des cadets créé en 1731, dispensaient un enseignement du dessin, ce dernier n’était qu’un complément de culture à une éducation militaire. Et s’il existait des écoles d’art auprès des manufactures ou des grandes administrations, comme la Chancellerie des bâtiments de Saint-Pétersbourg, elles s’apparentaient plus à des ateliers professionnels qu’à des académies de dessin. Seule, sans doute, l’école mal connue de l’architecte Dmitri Oukhtomski, située à Moscou, peut être considérée comme un centre d’enseignement théorique et pratique de l’art.

Saint-Pétersbourg sous Elisabeth Petrovna (1741-1762). ­ Le milieu du xviiie siècle correspond à un moment extrêmement favorable à l’épanouissement de l’art occidental en Russie. Grâce à la suppression progressive du service, obligatoire pour la noblesse, une frange éclairée de la société russe prend le temps de s’occuper plus activement de ses domaines, de voyager à l’étranger et de commander des œuvres d’art ou des bâtiments. De plus, pendant un court laps de temps qui correspond aux années 1756-1762, la francophilie de la société aristocratique s’étendit au domaine politique. C’est dans ce contexte que l’Académie des beaux- arts fut fondée.

Chapitre III
Les premières années (1757-1764)

Ivan Chouvalov et la fondation de l’université de Moscou. ­ Force est de reconnaître le rôle du fondateur de la première université civile de l’empire, Ivan Chouvalov, le favori de l’impératrice Elisabeth Petrovna, et du savant et poète Mikhaïl Lomonossov, son protégé. Tous deux cherchaient à doter la Russie d’institutions d’enseignement supérieur sur le modèle des universités du monde germanique. L’Académie des beaux-arts, fondée par un oukase impérial du 4 novembre 1757, était censée permettre au pays de produire de lui-même les œuvres d’art et les produits de luxe qui étaient importés à grands frais de l’étranger.

Les premiers temps. ­ L’Académie s’installa dans l’île Vassilievski, quartier savant et administratif de Saint-Pétersbourg, dans le voisinage du Corps des cadets et de l’Académie des sciences. Les premiers étudiants, âgés de 13 à 20 ans et de niveaux différents, venaient de l’université de Moscou, étaient envoyés par la Cour ou recrutés parmi les enfants du voisinage de l’Académie. Le choix des professeurs des principales classes artistiques fut d’une grande homogénéité. La plupart étaient proches des académies parisiennes et avaient séjourné à l’Académie de France à Rome. L’Académie impériale, malgré son rattachement à l’université de Moscou, acquit une autonomie précoce, en étant financée directement par le Cabinet impérial à hauteur de 6 000 roubles en 1758, puis de 40 000 roubles par an après 1764.

Catherine II et le changement de programme. ­ En mars 1763, Ivan Chouvalov est remplacé à la tête de l’Académie par Ivan Betskoï, le père d’un vaste plan de réforme de l’enseignement secondaire russe voulu par la nouvelle souveraine. Sur le modèle de l’Institution des jeunes filles de Smolny, de l’Hôpital des enfants trouvés de Moscou ou de l’Ecole des cadets, l’Académie des beaux-arts se voit adjoindre un lycée qui accueille les enfants dès l’âge de six ans pour les éduquer selon des méthodes inspirées de Locke et de Rousseau. Dans la droite ligne des principes de Pierre le Grand, Ivan Betskoï cherche à créer une nouvelle société russe, en rupture avec un passé barbare et inculte. Catherine II se pose en véritable fondatrice de l’Académie, en octroyant des privilèges et un règlement en novembre 1764 auxquels est donnée la plus grande publicité, grâce notamment à une nouvelle traduction en français réalisée par le docteur Clerc et Diderot en 1775. Désormais, pour la postérité, l’Académie fut fondée en 1764 par Catherine II.

Deuxième partie
Mise en place

Chapitre premier
Le bâtiment et son architecte

Jean-Baptiste Michel Vallin de La Mothe. ­ Formé dans l’Ecole des arts de son cousin Jacques-François Blondel, Vallin de La Mothe ne tenta jamais d’entrer à l’Académie royale d’architecture, mais partit à Rome où il séjourna deux ans, durant lesquels il connut certains de ses collègues à Saint-Pétersbourg, comme Nicolas Gillet ou Lagrenée l’Aîné. Profondément marqué par les recherches de Piranèse et l’œuvre de Palladio qu’il eut l’occasion de voir lors d’un tour de la péninsule, il rentra en France dans l’agence de son oncle, Jean-François Blondel, et présenta un projet pour la place Louis XV. Privé d’emploi à la mort de son parent en 1756, il accepta le poste d’architecte à l’Académie des beaux-arts de Saint-Pétersbourg. Dans la capitale russe, il mit fin à la suprématie de Francesco Rastrelli, en accentuant les contrastes de lumière et de volume sur les façades au détriment de l’ornementation. Son style, tout en s’adaptant à l’extrême diversité des programmes traités ­ palais urbains, église, bâtiment des marchands, entrepôts, intérieurs impériaux, projets d’urbanisme ­ suit de très près l’évolution européenne qu’il devance parfois. Victime de son manque d’intégration dans les cercles du pouvoir et d’une santé fragile, il dut cependant mettre un terme à une brillante carrière en Russie en 1775.

La conception du bâtiment académique. ­ En tant que premier architecte de l’Académie, Vallin de La Mothe fut chargé en 1763 de dessiner un bâtiment qui serait parfaitement adapté à l’institution. Un premier projet avait été demandé en 1757 à Jacques-François Blondel pour Moscou. Si Vallin de La Mothe reprit des éléments de l’élévation et du décor intérieur du projet de son ancien maître, il s’en est fortement éloigné dans le plan, un rectangle de 140 sur 125 mètres contenant une vaste cour circulaire cantonnée de cours secondaires. Ce plan, ainsi que le choix de la couverture (des toits plats et un dôme surbaissé) sont révélateurs de l’influence du séjour italien qu’effectua l’architecte de l’Académie et qui le distingue si fortement de Jacques-François Blondel.

Un long chantier. ­ Par une politique de location et d’achat systématique, l’Académie réussit à acquérir en quelques années une vaste parcelle cohérente et à modeler un quartier entier qui prit son nom. Le chantier débuta à l’été 1765. Ce dernier était coordonné par une structure administrative, l’“ Expédition de construction ” qui devait être indépendante de l’administration académique proprement dite. Cependant, la direction des deux structures étant confiée à un même homme, l’architecte Alexandre Kokorinov, des confusions budgétaires entraînèrent des problèmes financiers qui marquèrent l’arrêt du chantier de 1768 à 1776. Le gros-œuvre étant achevé vers 1781, ce n’est cependant qu’en 1794 que le bâtiment put être occupé.

Chapitre II
Cadre institutionnel

Un texte fondateur. ­ Les privilèges octroyés par Catherine II à l’Académie avaient pour but d’assurer à l’institution une autonomie juridique et, dans une certaine mesure, judiciaire. En même temps, ils octroyaient un privilège de liberté, si important dans la Russie du xviiie siècle, pour tous ses membres. En plaçant les cadres académiques à un niveau élevé de la Table des rangs, qui définissait la place de chaque homme dans la société, ce texte tentait de donner à l’artiste un véritable

statut.

Organes de direction. ­ Le président représentait personnellement le souverain avec lequel, à notre connaissance, l’Académie n’eut aucun contact direct en dehors des visites qu’il pouvait y effectuer lors de certaines remises de prix. La direction réelle était confiée à l’Assemblée académique, peu convoquée, et surtout au Conseil restreint composé du directeur, du secrétaire de conférence et des professeurs des arts libéraux. Aucun représentant de l’Ecole d’éducation (le lycée académique), ni des métiers, n’en était membre de droit ; de plus les professeurs n’étaient pas tous assidus, ce qui entraîna une prépondérance des discussions d’ordre administratif aux dépens des questions pédagogiques, tendance renforcée par le choix du directeur hors du milieu artistique à partir de 1773.

Les finances. ­ L’Académie disposait d’un budget annuel qui pouvait atteindre 60 000 roubles et dont la gestion échappait à tout contrôle extérieur. La confusion des différents postes de dépense entraîna à la fin des années 1760 un déficit qui mit en danger la survie de l’institution. Ce n’est que grâce à l’arrêt des dépenses de construction et surtout grâce à une gestion cohérente des budgets et à la reprise de l’aide gouvernementale que l’Académie put continuer à mener à bien.

Chapitre III
Vie de l’établissement

Intendance. ­ Les trois cents élèves et la soixantaine d’employés et de professeurs de l’Académie étaient logés sur place. Les élèves les plus âgés habitaient avec leurs maîtres dans des appartements mis à leur disposition par l’Académie. Tous disposaient d’un uniforme qui reflétait une hiérarchie interne conçue pour favoriser l’émulation. La cohésion de cet ensemble était renforcée par les repas pris en commun. La discipline, particulièrement stricte, interdisait toute sortie non autorisée.

Distractions, ouverture vers l’extérieur. ­ Cependant, les responsables académiques surent promouvoir des espaces de récréation et un théâtre amateur qui bénéficia du concours des plus grands professionnels de la Cour. La musique occupait une place non négligeable, puisqu’elle suscita des vocations chez plusieurs étudiants qui devinrent des compositeurs renommés. Les responsables académiques avaient tendance à encourager toute vocation artistique ou artisanale, quitte à sortir des cadres pédagogiques fixés à l’origine.

Pour se faire connaître, l’Académie comptait sur les amateurs d’honneur, exclusivement choisis dans l’aristocratie russe ou étrangère, et sur les membres honoraires ou les sociétaires libres qui lui permettaient d’établir des liens avec les artistes européens. Les productions académiques étaient répandues, non pas grâce aux expositions annuelles qui n’eurent jamais le succès ni l’impact des Salons parisiens, mais grâce à la vente d’œuvres d’élèves ou de professeurs et aux reproductions de sa collection de moulages.

Troisième partie
Enseignement

Chapitre premier
Enseignement général

Les élèves. ­ A partir de 1764, l’Académie procéda tous les trois ans au recrutement de soixante élèves âgés de cinq ou six ans. La volonté initiale d’Ivan Betskoï de ne prendre que des Russes issus de milieux modestes semble avoir été parfaitement respectée. L’écrasante majorité d’entre eux sont fils de simples soldats, quelques-uns d’artisans ou de petits fonctionnaires. Le but avoué de l’Académie des beaux-arts était de former une partie du futur tiers-état qui faisait tant défaut à la société russe, et ce point sembla avoir été acquis à la fin du xviiie siècle.

Les études. ­ Le cursus s’étalait sur quinze années réparties en cinq classes ou “ âges ” de trois ans. Les trois premiers constituaient l’Ecole d’éducation : les élèves y étaient progressivement initiés au dessin et à chacun des trois arts libéraux entre lesquels ils avaient à choisir vers l’âge de douze ans. Parallèlement à l’enseignement général, concentré particulièrement sur l’étude des langues étrangères, les élèves recevaient une véritable éducation qui avait pour objectif d’en faire des citoyens et des hommes capables d’évoluer dans les cercles cosmopolites de la nouvelle Russie.

Les réformes des années 1780. ­ Les difficultés croissantes que subit l’Académie connurent leur paroxysme au début des années 1780 lorsque la guerre qui opposait les partisans de l’éducation à la française aux patriotes russes vit la victoire définitive de ces derniers sous l’influence grandissante du secrétaire d’Ivan Betskoï, l’écrivain Iakov Kniajnine. Le Conseil ne comptait déjà plus de professeurs étrangers. Les institutrices et les gouverneurs français chargés de l’éducation des enfants furent remplacés par des Russes. La place de l’apprentissage des langues étrangères fut réduite au profit de cours de littérature et d’histoire nationales. L’Académie s’inscrivait dans le mouvement patriotique russe qui connut son plein épanouissement dans le romantisme des premières années du XIX e siècle.

Chapitre II
Enseignement artistique

Outils. ­ Selon un principe commun à la plupart des académies, les étudiants suivaient tous des cours réguliers de dessin et d’anatomie. Ils bénéficiaient d’une importante collection d’œuvres d’art constituée de morceaux de réception, de dons de professeurs ou de grands prix d’étudiants, mais aussi d’apports de particuliers, notamment grâce aux tableaux de la collection d’Ivan Chouvalov, aux dessins de la collection d’Ivan Betskoï et des dons impériaux. Mais la renommée de l’Académie reposait sur sa collection de moulages d’antiques envoyés de Rome dès 1758. Une bibliothèque qui contenait à la fin du siècle plus de 1 500 volumes in-folio, 4 500 estampes et plus de 7 000 dessins et croquis d’architecture, était largement accessible aux étudiants et aux professeurs, contrairement à ce qui se passait à Paris.

L’enseignement académique. ­ Le système d’émulation était parfaitement calqué sur celui des académies parisiennes ; cependant l’attention personnelle accordée à chaque élève dénotait le caractère scolaire de l’institution. L’enseignement était assuré jusqu’aux années 1770 par des professeurs étrangers qui tâchaient d’encourager l’esprit patriotique de leurs élèves en ne proposant que des sujets tirés d’une histoire russe à peine exhumée par Mikhaïl Lomonossov. La seconde période était dominée par les anciens pensionnaires russes revenus de Paris et de Rome. L’Antiquité romaine était adaptée à l’amour russe des ornements et de la grandiloquence. La particularité de l’Académie de Saint-Pétersbourg était cependant de proposer aux étudiants qui ne pouvaient entrer dans les classes artistiques l’apprentissage d’un métier d’art enseigné par des maîtres artisans salariés et logés par l’institution.

Chapitre III
Les pensionnaires

A la fin d’un cycle complet d’études, les meilleurs étudiants, en termes de résultats, mais aussi de comportement, étaient envoyés à Paris pour se former auprès de ceux que les autorités académiques considéraient comme les meilleurs artistes de l’Europe, et à Rome pour y découvrir “ les grands modèles éternels ” selon les termes du baron Melchior Grimm dans une lettre à Catherine II. Les rapports trimestriels qu’ils avaient l’obligation d’envoyer représentent la source la plus complète et la plus précise dont pouvait disposer la Russie sur l’actualité artistique occidentale. Les problèmes de discipline ne peuvent occulter l’utilité d’un tel séjour, puisque la quasi-totalité des professeurs académiques étaient anciens pensionnaires.

Chapitre IV
De l’utilité d’une académie des beaux-arts en Russie

Malgré le succès que rencontrait son atelier de fonderie, considéré comme le meilleur de l’empire, l’Académie ne parvenait pas encore à trouver un marché assez grand et un soutien assez fort de la Cour pour garantir une carrière à ses étudiants beaucoup se détournaient de la voie artistique en voyant leurs aînés, tel Anton Losenko, mourir dans la misère faute de commandes. Pourtant, malgré l’échec de ses tentatives pour établir un monopole de l’enseignement de l’art, l’Académie est investie au début du xixe siècle d’une autorité incontestée dans le domaine artistique.


Conclusion

Dans une ville neuve, à l’image de la société que ses fondateurs lui assignaient de former, l’Académie impériale des beaux-arts représente l’apogée du mouvement académique, aussi bien dans sa réalisation architecturale que dans ses objectifs pédagogiques. Ses membres étaient portés par la croyance dans le pouvoir d’une éducation capable de transformer des fils de soldats ou de moujiks incultes en artistes susceptibles de rivaliser avec les maîtres des nations européennes.


Annexes

Programme d’enseignement de l’Ecole des arts. ­ Projet de place Louis XV de Vallin de La Mothe. ­ Contrat d’engagement de Vallin de La Mothe et lettres qu’il a adressées au marquis de Marigny. ­ Règlements et privilèges de l’Académie de Saint-Petersbourg. ­ Contrat d’un professeur et d’un maître artisan à l’Académie. ­ Listes de personnel, des programmes de Grands prix, d’achats pour les collections académiques. ­ Index des noms de personnes et des noms de lieux.


Illustrations

Album du projet d’Académie de Moscou de Jacques-François Blondel en grande partie inédit. ­ Dessins et réalisations de Vallin de La Mothe. ­ Plans et élévations du bâtiment académique. ­ Œuvres des élèves et des professeurs.