Un grand corps de l’Etat à l’épreuve du « schisme royal »
Le Parlement de Paris durant la période anglo-bourguignonne (1418-1436)
Introduction
Le Parlement de Paris est une des principales institutions du pouvoir central de la monarchie. Il représente à la fois la justice suprême et la souveraineté du monarque. Françoise Autrand a montré combien il est soucieux de son prestige et combien ses membres, qui appartiennent au même corps social, sont liés entre eux dans le cadre de différents réseaux. Mais la question est de savoir comment ce corps a réagi face à la crise de la monarchie Valois à partir de 1413 et plus encore comment le Parlement mis en place par Jean sans Peur, duc de Bourgogne, en 1418 lorsque ses troupes prennent Paris, a géré cet héritage politique, social et symbolique. Ce Parlement « bourguignon » doit faire face au « schisme royal », pour reprendre une expression de Philippe Contamine, qui voit le royaume déchiré entre deux systèmes politiques concurrents prétendant l’un comme l’autre gouverner l’ensemble du royaume en entretenant la fiction d’un fonctionnement normal : le système bourguignon puis Lancastre étant donné que, en application du traité de Troyes, le roi d’Angleterre Henri V est devenu régent de France en 1420 et son fils, Henri VI, roi de France et d’Angleterre en 1422, d’un côté ; la monarchie Valois représentée par le dauphin Charles, devenu Charles VII en 1422, de l’autre. La « double monarchie » franco-anglaise se prolonge jusqu’à la prise de Paris par les troupes du connétable Arthur de Richemont pour le compte de Charles VII, le 13 avril 1436.
L’étude du Parlement « bourguignon » doit prendre en considération trois problématiques historiographiques.
La cour souveraine des deux derniers siècles du Moyen Âge a attiré de nombreux chercheurs depuis François Blanchard au XVII e siècle. Les études reprirent au cours du xixe siècle, avec l’arrivée de ses archives au Palais Soubise en 1847. La fin du siècle et le début du xxe siècle voient la parution d’études purement institutionnelles ou politiques, à l’image des travaux de Félix Aubert ou d’Edouard Maugis. Les recherches sur la cour souveraine ont été profondément renouvelées au cours des deux dernières décennies du xxe siècle en prenant en compte les thématiques d’ordre social et symbolique, comme les travaux de Françoise Autrand.
La France « anglaise » ou « lancastrienne » et les officiers du roi bourguignons furent longtemps déconsidérés dans l’historiographie française. Alfred Coville s’insurge contre les « traîtres » qui ont signé le traité de Troyes « qui semblait mettre fin aux destinées de la France, naguère si brillantes, et faire de notre pays une annexe de l’Angleterre ». Trois courants historiographiques, identifiés par Philippe Contamine, se distinguent. Le courant « providentialiste » insiste sur les carences personnelles de Charles VII et accorde une place importante à l’année 1429, au sacre et à Jeanne d’Arc, qui ont permis au roi Valois de prendre le dessus dans sa lutte contre le Lancastre (Gaston du Fresne de Beaucourt, Edouard Maugis). Le courant « analytique et critique » souligne quant à lui les faiblesses internes de la France « anglaise », émaillée de révoltes paysannes, marquée par la crise économique à partir de 1430 malgré la « petite prospérité » de la décennie précédente, et soumise au maintien de l’alliance bourguignonne, toujours plus fragile jusqu’à la rupture du traité d’Arras de 1435 (Carl A. J. Armstrong). Le courant « révisionniste », enfin, étudie la manière dont la « double monarchie » fut acceptée et célébrée par une partie de la société politique et des élites économiques, à l’image des notaires et secrétaires du roi Laurent Calot et Jean de Rinel.
Enfin, l’étude des structures étatiques des xive et xve siècles a été renouvelée par celle de la « genèse de l’Etat moderne » qui précise comment le pouvoir royal s’empare ou souhaite s’emparer du monopole de la perception fiscale puis des levées militaires et enfin de l’initiative politique en s’appuyant sur les nécessités d’une période de guerre et de crise interne. Les pratiques du pouvoir se modifient et une « société politique » apparaît sous leur effet.
Sources
L’essentiel des sources utilisées sont les archives du Parlement conservées au Centre historique des Archives nationales. Les structures archivistiques du Parlement « bourguignon » sont révélatrices. Elles ne sont guère modifiées en 1418. Le greffier du Parlement civil, Clément de Fauquembergue, reste en place. Les mêmes registres continuent à être remplis, ce qui suggère que le personnel du greffe ne fut que partiellement remplacé et que les nouveaux venus sont imprégnés des pratiques scripturaires et archivistiques de la cour souveraine. Le pouvoir bourguignon trouve sa légitimité en se moulant dans le cadre laissé par son prédécesseur armagnac au pouvoir entre 1413 et 1418. Les registres sont de trois types : les registres purement parisiens (lettres, arrêts et jugés civils, Conseil civil, plaidoiries civiles), les registres où des cahiers parisiens sont reliés à la suite de cahiers poitevins (lettres, arrêts et jugés criminels) et les dossiers d’accords, qui sont réunis au xixe siècle dans un ordre strictement chronologique.
L’étude des parlementaires a été menée également à la Bibliothèque nationale de France, grâce au dépouillement de la collection des Pièces originales, des transcriptions de testaments (collection Moreau 1161 et 1162 et nouv. acq. lat. 184) ou des arrêts du Châtelet (collection Clairambault 763).
Première partieLe Parlement face à la crise politique (1413-1422)
Chapitre premierLe cadre de l’action
Les structures institutionnelles, sociales et symboliques du Parlement sont bien fixées en 1418. Les trois chambres (Grand-Chambre, Chambre des enquêtes, Chambre des requêtes) ont un fonctionnement et un personnel réguliers, qui se fixent par évolutions successives : les ordonnances de Philippe III (1278), de Philippe V (1318) et de Philippe VI (1345). La cour devient de plus en plus indépendante. Elle veut avoir le contrôle de sa composition par la pratique de l’élection. Des réseaux de solidarité se forment ainsi qu’un mode de représentation symbolique (modèle nobiliaire, habits particuliers, comparaison avec le Sénat de Rome). Des évolutions importantes se dessinent cependant : l’élection est placée sous le contrôle du chancelier et l’organisation du Palais de la Cité se modifie avec le départ définitif du roi en 1364 et la montée en puissance du concierge du Palais, qui est brisée par les Armagnacs en 1417.
Chapitre IILe parti bourguignon au Parlement avant 1418
Le prestige du Parlement et la solidarité de corps qui l’anime n’excluent pas la transposition des querelles partisanes en son sein. La notion de « parti » se précise et prend en compte une dimension politique. Le parti « bourguignon » comprend plusieurs strates : une fidélité d’ordre géographique, relevant de manière informelle du bastard feudalism, touchant la noblesse et la société politique des régions gouvernées par le duc de Bourgogne ou placées sous son influence ; une fidélité d’ordre politique, concernant une partie de la bourgeoisie parisienne, notamment les changeurs et les métiers exclus de la société politique parisienne, comme les bouchers. L’entrée des Bourguignons au Parlement se fait en plusieurs étapes : entre 1380 et 1382, vers 1400 et vers 1410, périodes où les ducs de Bourgogne sont au pouvoir à Paris. Ils défendent une ligne politique particulière, en s’alliant aux partisans de la soustraction d’obédience en 1398 par exemple. Les Bourguignons du Parlement considèrent cependant avec circonspection le mouvement cabochien.
Chapitre IIILe Parlement durant la période armagnaque (1413-1418)
La réaction anti-cabochienne inaugure une première période où le Parlement doit composer avec un pouvoir aux mains d’un seul parti, les Armagnacs, durant une période relativement longue. Ses contradictions annoncent celles du Parlement « bourguignon ». Les différentes proscriptions (1414, 1416 et 1417) touchent des futurs membres de cette cour ou leurs proches qui forment une catégorie supplémentaire au sein du parti bourguignon, d’autant plus qu’ils quittent parfois la capitale avec leurs clients. La proscription d’août 1417 touche pour la première fois des membres du Parlement en tant que tels mais la cour manifeste sa solidarité de corps en leur délivrant des lettres de sauf-conduit. En outre, elle refuse d’être instrumentalisée par le pouvoir représenté par le chancelier Henri de Marle. Les tensions entre le Parlement et la chancellerie, plus sensible aux aléas politiques, réapparaissent durant la période bourguignonne.
Chapitre IVL’éclatement institutionnel du royaume en 1417-1418
La proscription d’août 1417 rend le gouvernement définitivement illégitime aux yeux des Bourguignons. L’avancée des armées bourguignonnes au cours des années 1417 et 1418 permet à Jean sans Peur de s’emparer de la personne d’Isabeau de Bavière, qui reprend le titre de régente que lui accordent des ordonnances de 1403 en cas de crise de Charles VI. Le duc possède désormais un vernis de légitimité pour installer des contre-pouvoirs et des cours de justice souveraines à Amiens, Chartres et Troyes. Celle d’Amiens est présidée par Philippe de Morvilliers, futur premier président du Parlement « bourguignon ». La cour de Troyes scelle l’arrivée dans les instances centrales de la monarchie de conseillers venus du duché ou du comté de Bourgogne sans attache avec la société politique parisienne. Ces deux éléments annoncent les réformes futures de la composition du Parlement. En outre, ces cours ont un fonctionnement qui rappelle celui des Grands-Jours du Parlement.
De son côté, Henri V entame la conquête systématique de la Normandie. Mais son hésitation à agir en tant que duc de Normandie ou prétendant au trône annonce les futures ambiguïtés de la France lancastrienne. Il installe également un système institutionnel, avec un conseil à Rouen, qui fait office de cour de justice. Le royaume est donc divisé en trois ensembles institutionnels. Les Bourguignons comme Henri V remettent rapidement sur pied des institutions judiciaires et financières afin de faire la démonstration qu’ils sont capables d’assurer justice et paix sur leurs possessions ; ces instances jouent à la fois un rôle traditionnel et politique mais aussi propagandiste. Cette période est donc marquée par une multiplication des lieux de pouvoir, ce qui est une caractéristique de l’organisation du royaume jusqu’en 1436. Le pouvoir faible a besoin de réinvestir des lieux centraux pour lui. Cette situation se retrouve au même moment en Italie du Nord.
Chapitre VLe « schisme royal » (1418-1419)
La prise de Paris par les Bourguignons le 29 mai 1418 n’entraîne pas immédiatement la dispersion du Parlement « armagnac », qui continue à participer à l’activité politique. Il est dissout définitivement le 10 juillet. Le 16 juillet, des ordonnances révoquent l’ensemble des officiers royaux et le 22 un nouveau Parlement est nommé. Il siège pour la première fois le 25 juillet, en comprenant seulement cinquante-deux conseillers, et s’étoffe peu à peu. Quatre-vingts officiers en font partie lors de la rentrée du lendemain de la saint-Martin d’hiver, le 12 novembre 1418. Le Parlement « bourguignon » se constitue donc en deux étapes. Il doit faire face à l’avancée d’Henri V, qui perturbe le déroulement des sessions, et au vide du pouvoir à Paris, car le roi Charles VI est emmené avec Jean sans Peur. Il s’immisce donc dans l’administration de la capitale.
Chapitre VIVers la double monarchie (1419-1422)
L’assassinat de Jean sans Peur à Montereau le 10 septembre 1419 brise tout espoir de réconciliation entre les deux systèmes monarchiques. Dans les discours tenus devant le Parlement, apparaît l’idée que le dauphin Charles se comporte comme un tyran, ce qui justifie sa mise à l’écart. Pourtant, les négociations amenant à la signature du traité de Troyes, le 21 mai 1420, sont sources de conflit entre le Parlement et le pouvoir central. La cour et les représentants de la société politique contestent la manière dont le duc de Bourgogne et la chancelier Eustache de Laître les conduisent. L’application de ce traité est difficile. Une courte période d’interrègne sépare la mort de Charles VI, le 20 octobre 1422, et la reconnaissance d’Henri VI, lors d’une séance « royale » au Parlement, le 19 novembre 1422.
Deuxième partieLes parlementaires en réseau
Chapitre premierAutour de la notion de réseau social
La notion de réseau social est à mettre en lien avec l’analyse structurale des groupes sociaux menée par les sociologues dans le sillage de Georg Simmel. L’expression « réseau social » ( social network) apparaît sous la plume de John A. Barnes en 1954 et se définit comme un ensemble d’unités sociales et des relations que ces unités entretiennent entre elles. On peut les représenter grâce à la « théorie des graphes », élaborée par Köning en 1936. Cette visualisation permet de mesurer la densité du réseau et ainsi le « capital social » d’un individu. Ronald Burt a mis en lumière l’importance des « trous structuraux » – un même individu connaît deux personnes qui n’ont pas de relation entre elles –, qui permettent de diversifier les sources d’informations et d’étendre les réseaux hors de leur cadre socio-géographique d’origine.
Chapitre IILa composition générale du Parlement
52% des membres du Parlement nommés en 1418 sont des nouveaux conseillers. Le Parlement résiste mieux que la chancellerie. Il souhaite se glisser dans le moule du Parlement unifié d’avant 1418, sans y parvenir complètement. Ses effectifs chutent brusquement entre 1418 et 1421, pour se maintenir à un cinquantaine de membres tout au long de la décennie 1420-1430 et avant de diminuer à nouveau jusqu’à 22 membres en 1432. Mais les conseillers écartés ou partis forment un vivier auquel la cour peut faire appel pour renforcer ses effectifs ou remplir des fonctions précises. Les effectifs du Parlement de Poitiers restent inférieurs à celui de Paris jusqu’en 1430. En outre, certains conseillers du Parlement restent sensibles à l’humanisme parisien qui était florissant avant 1418 (Simon de Plumetot). Les bénéfices ecclésiastiques des conseillers restent confinés dans un petit nombre de régions.
Chapitre IIILes carrières politiques
Le déclin de la pratique de l’élection se poursuit, ce qui est un point commun entre Paris et Poitiers. Une partie importante des conseillers ne fait qu’un bref passage à la cour. Certains désertent sans aucune justification. C’est notamment le cas des conseillers des ducs de Bourgogne venus de Dijon ou de Dole, peu intégrés au milieu parisien.
Chapitre IVLes anciens réseaux qui survivent
Les réseaux constitués autour des présidents du Parlement de Charles VI, Jacques de Ruilly et Simon de Nanterre, ainsi que celui issu des marchands de la vallée de l’Yonne, se maintiennent. Le fait qu’ils soient centrés sur des personnes disparues engendre un processus d’ossification. Mais certains membres de ces réseaux diversifient leurs contacts hors de leur milieu d’origine. Ce regain de vitalité ne comble pas cependant la perte de vitesse de ces réseaux anciens, pour qui la réunification de 1436 est fatale.
Chapitre VLes nouveaux venus de la bourgeoisie parisienne
Des réseaux profitent du « schisme royal » pour entrer au Parlement ou se développer : celui autour de l’huissier Thomas Rat et du conseiller Robert Agode, du président Robert Piédefer ou d’Hugues de Dicy. Le Parlement s’ouvre donc davantage à la bourgeoisie parisienne, ce qui permet de renouveler le milieu parlementaire. Pourtant, ces réseaux sont souvent liés aux réseaux plus anciens et trouvent en eux un certain renouveau.
Chapitre VILes clercs normands : un groupe cohérent
Le réseau des clercs normands est cohérent géographiquement (la Normandie est leur base provinciale) et idéologiquement. Leur présence au Parlement « bourguignon » témoigne de leur alliance avec le parti de Philippe le Hardi et de Jean sans Peur au moment de la soustraction d’obédience. Lui aussi s’ossifie.
Chapitre VIILes conseillers des ducs de Bourgogne
Les conseillers issus des institutions des ducs de Bourgogne ne forment pas un réseau régional. Ils se maintiennent avec difficulté à la cour souveraine, étant donné leur manque de liens avec la société politique parisienne et retournent rapidement au service du duc, à l’exception du président Richard de Chancey et du conseiller Claude Rochete.
Chapitre VIIIPhilippe de Morvilliers : un président isolé ?
Philippe de Morvilliers, premier président du Parlement en fonction de 1418 à 1433, vient de Picardie. Son intégration partielle au milieu parlementaire est révélatrice des ambiguïtés des attaches de nombre de conseillers en son sein. Son mariage avec Jeanne du Drac le rapproche des restes du réseau ancien de Jean d’Ay, avocat au Parlement à la fin du règne de Charles V. Philippe de Morvilliers est cependant proche du changeur Guillaume Sanguin. Il cherche à combler ce manque d’attaches par une politique de prestige (tombeau à Saint-Martin-des-Champs), attitude qui se place dans l’évolution plus générale de la recherche de prestige par les membres du Parlement.
Chapitre IXLes conseillers non Bourguignons
Des membres du Parlement proviennent de réseaux peu favorables aux Bourguignons, ceux de Robert Mauger ou d’Henri de Marle. Mais leur présence révèle a posteriori des tensions internes et des divisions partisanes dans ces réseaux. Des conseillers comme Bertrand Fons ou Jean de Voton sont originaires de régions dont les seigneurs mènent une politique de bascule entre Charles VII et Philippe le Bon : le comté de Foix et le duché de Savoie. D’autres conseillers, comme Barthélemy Le Viste et Guillaume Aymery, appartiennent à la bourgeoisie de villes fidèles à Charles VII, Lyon et Saint-Flour.
Chapitre XRéseaux et partis
Les différents réseaux ne correspondent pas aux divisions partisanes. Certaines solidarités éclatent au cours de longs procès. Quatre conseillers parisiens passent en outre au Parlement de Poitiers en 1419 et 1420.
Troisième partieActivité politique du Parlement
Chapitre premierL’activité générale du Parlement
L’activité du Parlement est gênée par des troubles de diverses natures. La cour est en conflit de plus en plus violent avec la chancellerie pour le paiement des gages des conseillers. Elle se met pour la première fois en grève en novembre 1430, puis à nouveau entre avril et décembre 1431 et de novembre 1432 à février 1433. La visite d’Henri VI en France et la séance en sa présence le 26 décembre 1431 ne résolvent rien. Cette crise culmine avec la disgrâce de Philippe de Morvilliers en février 1433, que le Parlement n’accepte pas. Le ressort du Parlement révèle des évolutions profondes de la structure institutionnelle du royaume. Le duc de Bedford maintient à Rouen un conseil souverain. De son côté, Charles VII installe un Parlement à Toulouse. Ces transformations annoncent la création de parlements provinciaux.
Chapitre IIActivité judiciaire
L’activité du Parlement comme de la chancellerie se maintient jusqu’en 1428 à un niveau proche de celui d’avant 1418. Mais les enregistrements diminuent pour l’un comme pour l’autre en 1428. La crise de la France lancastrienne est donc antérieure au sacre de 1429 et à Jeanne d’Arc. La visite d’Henri VI permet de réactiver quelque peu ces institutions, de 1431 à 1433. L’activité du Parlement repose sur un petit nombre de conseillers.
Chapitre IIILe Parlement, le régent et le chancelier
Un petit nombre de parlementaires participent aux autres institutions (conseil du roi, offices de baillis). Les serments de fidélité prêtés par les conseillers en 1420, 1429 et 1436 révèlent que le pouvoir et la société politique reposent sur une transmission par capilarisation, d’un degré supérieur aux représentants d’un degré inférieur, chargés ensuite d’aller reproduire le serment au sein des institutions qu’ils représentent. Le Parlement est en conflit avec le duc de Bedford au sujet de la Normandie et du Maine, que le régent veut enlever de la juridiction du Parlement.
Chapitre IVLe duc de Bourgogne et le Parlement
Le même type de conflit se produit avec Philippe le Bon qui cherche à obtenir la souveraineté juridique de la Bourgogne et de la Flandre. Cependant, les rapports ne se gâtent pas autant qu’avec le chancelier. Le duc de Bourgogne est considéré par le Parlement comme une force protectrice. Les liens ne sont pas rompus après la signature du traité d’Arras en septembre 1435.
Chapitre VLe Parlement, l’Église, l’Université
Le conflit entre le Parlement et le pouvoir central se produit également au sujet des « libertés de l’Eglise de France ». Les Armagnacs ont adopté en mars 1418 des ordonnances limitant le pouvoir pontifical. Jean sans Peur veut les supprimer mais il se heurte à l’opposition du Parlement. La cour est contrainte d’enregistrer l’abolition en mars 1419 mais refuse de l’appliquer. Le duc de Bedford doit également compter avec l’opposition du Parlement qui bataille contre les ordonnances de novembre 1425 accordant au pape la collation des bénéfices abbatiaux et épiscopaux. Les rapports entre le Parlement et l’Université se placent dans la continuité de la période antérieure.
Quatrième partieLes parlementaires et les réseaux bourguignons après 1436
Chapitre premierD’un Parlement l’autre
Le connétable de Richemont, qui s’empare de Paris le 13 avril 1436, ne disperse pas le Parlement qui replace à sa tête Philippe de Morvilliers. Ce n’est que sur ordre de Charles VII que la cour est dissoute officiellement le 15 mai 1436. Une commission de douze membres assure la transition. Le Parlement « unifié » s’ouvre le 1er décembre 1436 en réunissant des anciens membres des Parlements de Paris et de Poitiers, malgré les protestations de quelques Poitevins.
Chapitre IILa cour du conseil de Rouen
Guillaume Le Duc, Simon de Plumetot et André Marguerie demeurent au service d’Henri VI et participent à la cour du conseil de Rouen, issu du conseil mis en place par Henri V, qui acquiert progressivement les pouvoirs d’un parlement provincial et qui se réunit jusqu’en 1449.
Chapitre IIILes Bourguignons au Parlement après 1436
Sept anciens conseillers bourguignons sont réintégrés par la volonté de Philippe le Bon, en application d’une clause secrète du traité d’Arras. Le Parlement proteste quand il est fait officiellement mention de cette intervention. Les anciens Bourguignons poursuivent une carrière normale au Parlement de Charles VII.
Chapitre IVLes réseaux bourguignons après 1436
Dans leur majorité cependant, les Bourguignons sont exclus de la cour. Leurs descendants siègent dans des juridictions inférieures. Leur progression sociale est freinée après 1436.
Conclusion
Le Parlement « bourguignon » ne se comporte pas comme une cour partisane. Il prend place dans la crise de la légitimité monarchique des premières années du xve siècle. La cour se situe dans une évolution plus générale des institutions et de la société politique. L’élection tombe en désuétude. La juridiction du Parlement hors d’un bassin parisien large est contestée. Les structures de la société politique se modifient : les réseaux d’alliés deviennent des réseaux d’héritiers.
Annexes
Un tome d’annexes rassemble une édition d’actes concernant les parlementaires bourguignons, afin de dresser une typologie de la production d’actes de la cour souveraine. Des tableaux et des cartes représentent le ressort comparée du Parlement et de la chancellerie durant le règne d’Henri VI (1422-1436).