« »
École des chartes » thèses » 2015

Vivre hors du cloître

L'habitat canonial à Metz au Bas Moyen Âge (1200-1530)


Introduction

L'histoire de l’Église est un domaine vaste, qui a fait l'objet de nombreuses études dès avant la Révolution. De multiples champs d'étude ont été bel et bien explorés par les chercheurs dès la fin de l'époque moderne, et ont connu des développements croissants avec l'essor des sciences historiques au milieu du xixe siècle. Cet éventail s'est considérablement enrichi au xxe siècle sous l'influence de l'histoire économique et sociale, et par l'action de l'archéologie – plus particulièrement de sa composante qui est l'archéologie du bâti, discipline qui permet aujourd'hui de revisiter une part importante du patrimoine subsistant ou disparu et qui s'avère être un outil appréciable pour l'histoire des structures restées debout. Cette variété des angles d'approche n'a cependant pas épuisé la richesse du sujet. En particulier, la question du quotidien et du mode de vie des ecclésiastiques et des personnels gravitant autour d'eux n'a encore que rarement été posée. Si on a pu étudier l'héritage architectural et artistique de l'Église, on ne s'est que peu intéressé aux chanoines, dignitaires, chapelains, voire aux officiers laïcs, qui entretenaient les édifices, commandaient les objets, ou assuraient le bon déroulement du culte. Certes, les ouvrages sur le monde canonial et les groupes cathédraux se sont multipliés au xxe siècle, mais c'est omettre une chose : il s'agit rarement d'une approche concrète de la vie des hommes concernés. Ce constat renouvèle les interrogations quant à la place des clercs dans les hiérarchies sociales et à leur insertion dans un habitat local, et porte à se tourner vers un milieu bien connu en apparence, mais dont les traces archivistiques et architecturales n'ont été que partiellement exploitées : le monde des chanoines.

Ce thème comporte un avantage certain : si toutes les communautés canoniales semblent fonctionner d'après le même modèle, leur nombre écrasant est une assurance de diversité. Même sur le plan individuel, le chanoine, trop souvent réduit à son rôle de desservant plus ou moins assidu des cathédrales ou des collégiales, est en réalité un individu complexe, rattaché toujours de par ses activités à l’Église universelle, ouvert souvent par le jeu des carrières à un horizon plus large que son diocèse, imprégné même parfois d'une culture étrangère à son lieu d'exercice. Les évolutions de la règle de Chrodegang et l'apparition de nouvelles pratiques communautaires ont fini par faire des chanoines des clercs séculiers, vivant parmi les laïcs en observant toutefois un certain nombre d'obligations communes. Le cas du tout premier chapitre historique, à Metz, est prometteur, car les aléas de l'histoire l'ont placé sur un terrain intéressant, l'ancienne Lotharingie, relevant du Saint-Empire dès la fin de l'époque carolingienne, mais restant culturellement lié à l'ancien royaume franc. L'histoire et l'historiographie locales amènent à restreindre le champ d'analyse à la période médiévale, plus exactement à la période comprise entre 1200 et les années 1520. Il faut préciser dès maintenant qu'il s'agit de l'époque traditionnellement considérée comme l'apogée de la ville, ce qui ne peut que garantir la richesse de toute étude concernant ces trois siècles de Bas Moyen Âge messin.

Il est possible d'avoir un aperçu des usages quotidiens et du cadre de vie des chanoines de la cathédrale de Metz, dans la mesure où l'habitat canonial est encore relativement présent dans la topographie urbaine. Ce champ d'étude a été effleuré par le passé à travers l'étude topographique des groupes cathédraux, voire des quartiers canoniaux. Un mouvement général d'explosion des cloîtres canoniaux au xiie siècle a abouti à l'apparition des « maisons canoniales » au début du xiiie siècle. Les chanoines, renonçant alors définitivement à la vie commune, ont choisi de vivre dans des résidences particulières parmi la masse des laïcs. Les « quartiers canoniaux » marquent les secteurs urbains alors privilégiés par les chanoines, mais leur réalité est parfois aléatoire. À Metz, la topographie canoniale et son insertion dans la cité restent des sujets un peu flous, d'autant que le contexte de grande mutation des années 1200 remet en cause les équilibres anciens. Autre question afférente, personne ou presque ne s'est réellement penché sur les maisons en elles-mêmes. Un chanoine ayant l'avantage, énorme pour le Moyen Âge, de disposer de revenus stables et réguliers, il est normal que son logis reflète son aisance. La question des arts mobiliers et décoratifs se pose en conséquence au sujet des maisons canoniales, de même que celle de leur structure et des activités qu'elles pouvaient accueillir. L'enjeu est ici de déterminer si une maison canoniale se distinguait de par son style ou sa composition d'une maison bourgeoise ou patricienne, d'autant que, règle oblige, un chanoine devait se plier à certains règlements concernant sa résidence.

L'étude de cet habitat canonial actualise ainsi certains points de l'historiographie locale et en particulier la question d'un certain tropisme italien imprégnant la cité. Elle suscite aussi un renouvellement en profondeur de la connaissance de l'architecture messine par une analyse complète d'un corpus de maisons bien identifié. Le statut social des chanoines s'en trouve également éclairé d'un jour nouveau.


Sources

Les sources sont essentiellement constituées de documents manuscrits conservés aux archives départementales de la Moselle. La quasi-totalité des archives du chapitre cathédral s'y trouve. Les plus anciennes pièces remontent au Haut Moyen Âge, mais le fonds ne gagne en substance qu'à partir du xiiie siècle. On y trouve de nombreux papiers de gestion, des titres de propriété, des statuts capitulaires, des pièces de procès, une liste à peu près fiable des dignitaires, ainsi qu'un corpus de documents privés regroupant des testaments de chanoines, mais aussi des dossiers de succession, des inventaires après décès et quelques contrats d'anniversaire. C'est une ressource très précieuse pour mieux appréhender l'environnement quotidien des chanoines et certaines de leurs activités. Au-delà de l'aspect institutionnel et prosopographique, le fonds du chapitre comprends des documents de nature foncière, principalement le fonds de la Maisonnerie, service en charge de la gestion patrimoniale, classé par rues, mais pour lequel nous n'utilisons qu'un quart des documents subsistant, à savoir la partie concernant les maisons canoniales et leur voisinage. Ces documents permettent de mieux cerner les activités de la Maisonnerie en tant qu'institution, et d'avoir une vision plus nette du tissu urbain dans lequel s'insèrent les chanoines. Le fonds du chapitre est complété par un dépôt privé issu de l'actuel chapitre cathédral, qui a confié aux archives départementales certains documents récupérés après la Révolution, principalement les statuts médiévaux, et les registres de conclusions capitulaires conservés depuis 1344.

La bibliothèque municipale de Metz conserve un certain nombre de manuscrits et d'incunables provenant directement du trésor ou de la bibliothèque du chapitre médiéval. Parmi ces ouvrages se distinguent quelques manuscrits directement utiles, parce qu'ils portent des indications sur les possessions du chapitre au Moyen Âge ou à l'époque moderne. De nombreux autres livres nous renseignent sur les goûts et les sujets d'étude des membres du chapitre, mais cela n'est qu'un point accessoire pour la compréhension du mode de vie canonial. La bibliothèque municipale conserve en revanche un instrument important qui est le plan Belle-Isle, datant de 1738, et qui a l'avantage de nous montrer la voirie et un cadastre sommaire de la ville de Metz avant de grandes campagnes d'urbanisme lancées dans les années 1740. Il s'agit d'un témoignage unique montrant la ville de Metz dans une configuration encore à peu près médiévale. On pourra enfin y consulter les chroniques médiévales.

On peut compléter notre examen du patrimoine capitulaire au moyen de quelques documents conservés à la Bibliothèque nationale de France, notamment le cartulaire-censier du chapitre élaboré en 1330.


Première partie
« Metz la riche » : apogée urbain et rayonnement canonial


Chapitre premier
Une ville en plein essor

L'histoire de la ville de Metz au Moyen Âge est remarquable, bien plus que ne le laisse penser sa place actuelle très secondaire dans le panorama français. Au début du Haut Moyen Âge, la ville voit son importance économique rehaussée d'un intérêt politique nouveau. Après avoir définitivement intégré le futur Saint Empire romain, Metz s'affirme comme une puissance locale autonome et redoutable, jusqu'à sa chute entre les mains d'Henri II en 1552. L’Église de Metz revêt un rôle de grande importance dès l'époque de Charles Martel, ses évêques s'arrogent ou se voient accorder les pouvoirs temporels, et arrivent à l'apogée de leur puissance au xie siècle.

Metz est à cette époque un important carrefour commercial et bancaire. La ville construit peu à peu un pouvoir municipal distinct à la faveur de la Querelle des Investitures, qui affecte gravement le pouvoir de l’Église du Saint Empire. La montée de la commune de Metz se concrétise au début du xiiie siècle, avec la Guerre des Amis, une guerre d'indépendance émancipant définitivement la cité de son évêque en 1234. Un nouveau régime entre en gestation aux xiiie-xive siècles. Une fois cette mutation effectuée, la cité de Metz s'impose au xive siècle comme le centre naturel de la Lorraine, confortant son pouvoir politique sur une assise bancaire de premier plan. Celle-ci est finalement décapitée par la Guerre des Rois en 1444, quand le roi René outragé par ses créanciers messins obtient de Charles VII qu'il assiège la ville. Metz sort ruinée de l'affrontement, et s'allie avec le duc de Bourgogne pour contrer les ambitions du duc de Lorraine et restaurer sa puissance, avant une période de marasme au début du xvie siècle, qui s'avérera fatale.

Chapitre II
Un chapitre riche et prestigieux

La ville de Metz a donc un passé brillant, puisque le Bas Moyen Âge est une période de rayonnement sans précédent pour elle à tous points de vue – rayonnement qu'elle n'a jamais retrouvé par la suite face à la concurrence d'autres villes plus favorisées à l'époque moderne et contemporaine. Le chapitre cathédral de Metz est historiquement le tout premier chapitre à voir le jour et est devenu un modèle pour le reste de la chrétienté occidentale. Sa règle d'époque carolingienne est modifiée à plusieurs reprises, jusqu'à la réforme de 1228 qui entérine la fin définitive du système communautaire mais fige le mode de gouvernement et les rapports internes du chapitre cathédral de Metz.

Cette mutation institutionnelle prend acte cependant de l'enrichissement collectif et individuel des chanoines, ainsi que de leur émancipation vis à vis des tutelles traditionnelles. Ces tendances se concrétisent par l'éclosion d'un nouveau mode de vie individualisé, fondé sur un système de maisons canoniales formé au xiiie siècle. Ce dernier n'adoptera une forme à peu près définitive qu'à la fin du xive siècle, dans un contexte de repli économique qui forçera le chapitre à demander une nouvelle réforme pour maintenir son niveau de vie.


Deuxième partie
Une vie aisée


Chapitre premier
Recrutement et carrières

Les chanoines de Metz forment une communauté régie par des règles strictes et qui nécessitent un effort financier au moment de l'intégration des nouveaux membres. En conséquence, les chanoines connus semblent provenir de familles relativement aisées, et peuvent avoir des réflexes clientélistes. Le chapitre ouvrant de surcroît des possibilités d'ascension, certains prébendés ont su faire preuve de capacités évidentes dans la gestion de leur carrière au sein du clergé local et auprès de la papauté. À partir du Concordat germanique de 1448, des liens semblent s'établir de surcroît entre les chanoines de Metz et les milieux romains.

Chapitre II
Revenus collectifs, revenus personnels

Le chapitre cathédral de Metz jouit depuis le Moyen Âge central d'une assise foncière confortable tant dans la cité que dans sa campagne. Cette aisance a amené des conflits fiscaux et politiques avec le gouvernement de la ville. Les chanoines, individuellement, bénéficient des moyens ordinaires que leur prête la communauté, mais ont en outre la faculté d'investir dans les domaines du chapitre et d'opérer des acquisitions privées, ce qui conforte leur influence dans la cité et leur donne un statut social.

Chapitre III
Un milieu favorisé

Un échantillon de chanoines repérés principalement dans les registres capitulaires rend possible un premier sondage pour connaître les catégories sociales représentées dans la communauté et l'aire d'influence de cette dernière. On voit ainsi la part de la noblesse connaître une relative régression face aux apports bourgeois et ruraux, tandis que la papauté place ses protégés et établit des liens privilégiés et possiblement durables avec certains dignitaires. Il apparaît en outre à la lecture des dossiers de succession et des chroniques urbaines que le chapitre jouit d'une proximité évidente avec la noblesse de Metz et en adopte les comportements. Cette évolution dans la culture des prébendés n'implique cependant aucun renoncement à leur identité cléricale, comme le prouvent les représentations de chanoines conservées – marquées par une adoption franche de l'esthétique de la Renaissance à la fin de la période. De même, les chanoines ne se ferment pas aux coutumes de la population dont ils assurent la direction spirituelle et adoptent leurs références socioculturelles.


Troisième partie
La Maisonnerie


Chapitre premier
Un éclatement topographique

Le patrimoine commun au sein de la cité semble marqué par l'héritage topographique de l'époque épiscopale. Les mutations profondes des années 1200, tant sur le plan économique que politique, avec l'explosion démographique et spatiale qui caractérise Metz à cette époque, conduisent à un éclatement du système de vie commune en vigueur depuis la fin du Haut Moyen Âge. Elles laissent néanmoins le parcellaire de l'ancien castrum entre les mains du clergé, qui, trop nombreux, ne forme pas de réel quartier canonial ni ne tente d'établir un contrôle juridique sur cette partie de la cité, à l'inverse de la plupart des autres cités épiscopales.

Chapitre II
Une institution pour un cadre de vie

Pour gérer ce patrimoine confronté aux mutations socio-économiques et aux appétits politiques d'une commune au pouvoir croissant, les chanoines de Metz, apparemment en même temps qu'ils abandonnent la vie commune dans les années 1200-1210, décident la création d'un office spécifique pour défendre les biens et les revenus fonciers du chapitre en ville : la Maisonnerie du chapitre. Ses activités, limitées cependant à l'égard des maisons canoniales, permettent de distinguer les modalités d'insertion des chanoines et de leurs biens dans le tissu urbain, et ont produit une documentation précieuse aujourd'hui pour définir un corpus de trente-sept maisons canoniales.


Quatrième partie
Habitat clérical, référent patricien


Chapitre premier
Le parti de la maison

L'examen du parcellaire dans son état des années 1730 permet de dégager les particularités structurelles des maisons canoniales et leurs disparités en matière de superficie, de volume, de gestion des espaces bâtis et ouverts, ainsi que de circulation. Sur un plan technique, les maisons ne semblent pas s'écarter fondamentalement des normes messines en vigueur à l'époque médiévale. Ces normes consistent en une construction systématique en pierre, couronnée de toitures basses couvertes de tuiles creuses masquées par des murs-écrans – schéma qui a pu passer dans l'historiographie locale, peut-être hâtivement, pour un marqueur d'une influence italienne à Metz. Les façades subsistantes dans des états variables sont en particulier tout à fait représentatives des usages ornementaux de l'architecture patricienne à Metz. Celle-ci est fondée d'une part sur une hiérarchie verticale du fenestrage – plaçant aux niveaux d'habitations de hautes fenêtres souvent géminées à tympans trilobés et à l'attique de petites fenêtres carrées –, et d'autre part sur une rhétorique seigneuriale s'exprimant par le goût des tours, des crénelages et des décors héraldiques.

Chapitre II
Structuration du parcellaire et distribution interne du bâti

Si on entre dans le détail des propriétés connues sur plan ou conservées in situ, une typologie des maisons en quatre catégories se dégage en fonction des modes d'occupation des sols. On peut ainsi citer le type 1, représentatif du modèle entre cour et jardin ; le type 2, qui se caractérise par une occupation systématique de la totalité de la façade sur rue, avec une tendance à scinder le bâti en deux corps d'hôtel distincts perpendiculaires à la rue ; un type 3, qui s'identifie au modèle bien connu de la maison-boutique ; enfin, un type 4, qui n'a que quelques occurrences dans toute la ville, et qui correspondrait aux témoins, ultérieurement remaniés, d'un parcellaire roman où le bâti originel constitue un « pôle » central.

L'étude des bâtiments met en évidence des tendances communes dans la répartition spatiale des activités et le rapport des propriétés à l'extérieur, mais démarque les exemples subsistants des modèles définis par l'historiographie locale, concentrée exclusivement sur les maisons-boutiques. En outre, une tentative de comparaison avec les hôtels patriciens conservés – jamais étudiés au-delà de leurs façades pour la plupart – confirmerait bien la typologie mise au point à partir des maisons canoniales.

En ce qui concerne la distribution interne des maisons canoniales, il n'est réellement possible d'éclairer qu'une maison du type 2, ayant appartenu à la fin du xve siècle à un riche et influent dignitaire du chapitre. On peut toutefois avoir des indices sur d'autres maisons en utilisant les inventaires après décès conservés et en se livrant à une analyse comparée des caves médiévales, qui semblent plaider pour une certaine homogénéité du type 2 au moins.

Chapitre III
Le décor

Les aménagements originels des maisons canoniales ont en majeure partie disparu, mais on dispose de précieux témoins des décors présents chez les chanoines à des époques différentes. Le xiiie siècle est illustré par deux plafonds à décor de bestiaire, qui sont des exemples de la culture érudite imprégnant les membres du chapitre au sortir de l'époque romane. Un autre ensemble décoratif, daté de la seconde moitié du xive siècle, fait montre d'une sécularisation nette de la culture capitulaire et d'une adhésion aux motifs héraldiques et courtois en vogue chez les élites laïques. Ces traits semblent confirmés par la comparaison avec des œuvres produites par les milieux canoniaux d'autres cités épiscopales, qui sont affectés par les mêmes évolutions culturelles que Metz.

Le mobilier des maisons canoniales n'est pas connu au-delà des mentions textuelles des dossiers de succession ; il convient donc de se documenter auprès des institutions disposant de meubles médiévaux pour avoir une idée de ce qui garnissait les salles et les chambres des maisons canoniales. Il faut faire une mention particulière des bibliothèques canoniales, dont une partie des manuscrits et incunables fait partie des collections publiques et renseigne non seulement sur les centres d'intérêt des chanoines et leur pouvoir de commande, mais encore sur les producteurs des ouvrages. Des relations nettes avec les enlumineurs et les imprimeurs italiens sont ainsi perceptibles à la veille de la Renaissance.


Conclusion

In fine, il apparaît que les chanoines de la cathédrale de Metz forment un milieu complexe, aux origines diverses, mais dont le statut social est solidement appuyé sur une fortune foncière constituée vraisemblablement dès le Moyen Âge central. Les maisons canoniales issues de ce patrimoine accompagnent en conséquence les mutations à l’œuvre dans la cité à la jonction des époques romane et gothique, sans que l'on puisse forcément en déterminer les jalons. Cependant, l'étude de ces résidences a montré que certains prédicats de l'historiographie locale devaient être revus et corrigés. En particulier, si la vieille idée selon laquelle l'architecture locale aurait calqué ses usages sur l'architecture italienne reste vraie pour certains aspects techniques, il est clair aujourd'hui qu'elle ne tient pas compte de témoins plus proches de la cité, dans des régions avec qui Metz avait certainement des contacts réguliers, comme la Bourgogne et la Rhénanie. De surcroît, les travers de l'historiographie et de l'histoire locale contemporaine font oublier souvent encore l'appartenance de la ville à l'Empire à l'époque médiévale, ce qui fausse nécessairement l'étude des bâtiments messins dans la mesure où l'Empire a connu des évolutions sensiblement différentes de ce qui a pu être observé dans la France capétienne. On peut ajouter que le monde des chanoines semble empreint d'une culture assez homogène, qui s'ouvre à la créativité des laïcs en affirmation au Bas Moyen Âge puis à la modernité de la Renaissance. Si les émotions de la réforme puis les troubles de l'installation des Français en 1552 ont quelque peu étouffé la création artistique à Metz, il est remarquable qu'une bonne portion des quelques exemples d'art de la Renaissance conservés sont imputables aux membres du chapitre cathédral et se trouvent en partie au sein des maisons canoniales subsistantes, preuve encore une fois des capacités d'adaptation et de l'attention de ce milieu aisé aux mutations du temps.


Annexes

Les statuts du chapitre de 1408. — Deux statuts du chapitre de 1454 et 1455. — Statut du chapitre de 1469. — Le dossier de succession de Jean Chardalle (1501-1507). — Extrait du dossier de succession de Jean Herbillon (1517). — Extrait du compte-rendu de la vente des meubles du coutre Hermann (1509). — Bourgeois et ruraux de Lorraine au chapitre de Metz. — Étrangers et inconnus au chapitre de Metz.