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École des chartes » thèses » 2008

Les Commissaires du quartier du Louvre (1751-1791)

Contribution à une histoire de la praxis policière dans le Paris du second xviiie siècle


Introduction

Comme le déplorait Steven Kaplan au début des années 1980, les historiens se sont longtemps désintéressés de la police de l’Ancien Régime. On se servait éventuellement des sources policières pour étudier la justice, la criminalité, la société, la ville et ses bouleversements, la librairie, le théâtre…, mais on ne s’intéressait pas à ceux qui les produisaient. Seuls les lieutenants généraux de police parisiens – omniscients et omnipotents – semblaient dignes d’intérêt. Les autres « mécaniciens » de la machine policière restaient dans l’ombre. Ces dernières années ont cependant vu une curiosité croissante pour l’histoire de la police, notamment celle de l’époque moderne. C’est dans ce mouvement que s’inscrit ce travail.

Étudier un des quarante-huit commissaires enquêteurs examinateurs au Châtelet de Paris au xviiie siècle et son activité paraissait un moyen de pénétrer l’institution policière par le biais d’un de ses acteurs essentiels, ceux auxquels la population avait le plus souvent affaire, ceux vers lesquels procureurs du roi au Châtelet et lieutenants de police se tournaient. Qui étaient-ils ? Quelle était leur formation ? À quoi ressemblait leur travail quotidien ? Comment s’organisaient-ils entre eux, y avait-il un partage des tâches, une spécialisation ? Quels Parisiens faisaient appel à eux ? Comment étaient-ils perçus par la population ?

Le commissaire Pierre Chénon est un personnage clef de l’administration policière parisienne et de la Compagnie des commissaires au Châtelet. En poste de 1751 à 1791 dans le même quartier, celui du Louvre-Saint-Germain-l’Auxerrois, il permet de suivre l’évolution des pratiques policières pendant presqu’un demi-siècle. En outre, il fut un homme de confiance de Sartine puis de Lenoir, un commissaire spécialisé, chargé de missions délicates comme la Bastille et la librairie. Ces tâches particulières font-elles de lui une figure représentative des commissaires au Châtelet ? Quoi qu’il en soit, elles ont l’intérêt de nous ouvrir des pistes nouvelles de questionnement : un commissaire spécialisé a-t-il encore le temps de se consacrer à des vols de draps et de mouchoirs, de recevoir les plaignants de son quartier ? Ou est-ce le second commissaire du quartier qui traite ces affaires quotidiennes et « subalternes » ? Y a-t-il une collaboration efficace entre commissaires et inspecteurs, les commissaires et le Guet ? Pour tenter de répondre à ces questions, il a semblé indispensable d’étudier en parallèle l’activité du second commissaire du quartier du Louvre. Trois hommes ont successivement occupé cette charge : Louis Cadot, Hubert Mutel, et enfin, Marie-Joseph Chénon, le fils de Pierre.


Sources

Parallèlement au fonds « Bastille » de la bibliothèque de l’Arsenal, les archives des commissaires au Châtelet sont conservées dans la série Y des Archives nationales. Toutes n’ont pu être analysées. Seules quelques années – correspondant aux changements de lieutenant général de police – ont été retenues afin de procéder à des comparaisons statistiques : nombre d’actes, types d’affaires et leur répartition entre les deux commissaires du Louvre, origines des plaignants… Ces archives s’avèrent exceptionnellement riches dans le cas de Chénon père (137 articles). On y trouve non seulement les procès-verbaux dressés par le commissaire, mais également la correspondance échangée avec les lieutenants généraux de police et les procureurs du roi, parfois avec ses administrés, voire des pièces annexes, comme des lettres de change. Ce magistrat avait aussi l’habitude de conserver les faire-part qu’on lui envoyait ainsi que les arrêts du Parlement concernant les affaires traitées. Malheureusement, les fonds des trois autres commissaires ne sont pas aussi complets et les archives professionnelles du commissaire Mutel manquent pour la période qui nous intéresse.


Première partie
Enquête sur des enquêteurs : quatre commissaires en leur quartier


Nos recherches nous permettent de comparer trois familles et quatre parcours de commissaires à la même période. C’est peu, si l’on compare ce chiffre aux quarante-huit commissaires au Châtelet en poste. C’est beaucoup, si l’on prend en compte que, jusqu’à présent, très rares avaient été les études consacrées à ces questions. Comment devient-on commissaire ? Pourquoi ? Y a-t-il une « vocation », une volonté d’ascension sociale, ou s’agit-il, comme Louis-Sébastien Mercier l’affirmait, d’un « clerc qui balance entre une étude de notaire, de procureur, ou une charge d’huissier-priseur » ?

Chapitre premier
Stratégies familiales et réseaux de sociabilités

L’étude des généalogies inégalement reconstituées des Cadot, Chénon et Mutel fait apparaître nettement les solidarités familiales mises en jeu au moment de leur achat d’office. Ces familles sont issues de milieux très différents, et les futurs commissaires n’ont pas les mêmes ambitions sociales.

La famille Cadot a ses racines dans le département actuel des Yvelines, à Neauphlette. Ce sont des propriétaires terriens, quoique le père de Louis Cadot soit aussi parfois qualifié de « négociant », et était peut-être dans le commerce des grains. Louis Cadot devient commissaire à Paris en 1731 ; toutefois, son ambition est de parvenir à la noblesse. Pouvant sans doute vivre de ses rentes, il délaisse ses fonctions de commissaire. Il vend finalement son office en 1764 avant d’acheter presque immédiatement une seigneurie, ce qui lui permet de parfaire sa noblesse de robe.

Hubert Mutel appartient à une famille de bourgeois parisiens ; sa femme est issue du monde des métiers. Si on en croit son inventaire après décès, le commissaire est un collectionneur avisé mais endetté, pour lequel un office est un « placement » avantageux. Son fils reste dans le milieu de la justice tout en poursuivant l’ascension sociale. Après la Révolution, il devient juge à Paris, après avoir été conseiller au Châtelet.

Comme les Mutel, les Chénon sont, au moins depuis le début du xviiie siècle, des bourgeois de Paris. La génération du commissaire Pierre Chénon voit se développer des alliances avec le monde de la justice, ses sœurs épousent des procureurs au Parlement. La femme de Pierre lui apporte des relations très précieuses pour sa carrière : elle est apparentée aux commissaires Parisot et à de nombreux huissiers. Leur fils, Marie-Joseph Chénon, devient commissaire en 1773. Comme son père, il paraît avoir une « vocation policière » et achète très jeune son propre office de commissaire. Le père et le fils continuent d’exercer jusqu’en janvier 1791.

Chapitre II
Itinéraires professionnels : formation et carrière

À quoi ressemblait la carrière d’un commissaire au Châtelet ? Son office était-il prestigieux ? Sans archives personnelles, il est très difficile de reconstituer leur formation. Certaines sources nous apportent néanmoins des renseignements, ainsi en va-t-il des commentaires sarcastiques dont Chénon fils parsème ses brouillons. Comme ses confrères, il est « avocat en Parlement ». Plus précisément, il a fait des études de droit à l’université de Paris. Pour le reste, il semble bien qu’une partie de l’apprentissage se fasse « sur le terrain », ou en tout cas dans l’hôtel d’un commissaire plus expérimenté.

En dépit d’une formation initiale juridique à peu près identique, il n’y pas un modèle de carrière. Les Chénon sont les deux commissaires qui s’intéressent le plus à la pratique de leur métier, ils sont distingués par leurs supérieurs, leur carrière est brillante. Le cursus de Pierre est très intéressant : très jeune, alors qu’il est en poste dans le quartier de Maubert, il est affecté dans le quartier du Louvre, où il est immédiatement nommé « ancien », au détriment de Cadot en poste depuis plus longtemps. Le lieutenant général de police avait-il remarqué les qualités prometteuses du tout jeune magistrat ou le désintérêt de Cadot pour ses fonctions ? Au contraire, est-ce l’absence de toute promotion qui entraîne le manque d’investissement professionnel de ce dernier ? Il semble que la carrière remarquable de Pierre Chénon ralentisse – presque mécaniquement – la carrière de son confrère. Seul son fils réussit à collaborer avantageusement avec lui.

Chapitre III
Soucis pécuniaires d’un commissaire au Châtelet

Les différences de carrière, de zèle et d’activité, se retrouvent-elles dans les revenus des commissaires ? Ces offices très recherchés devaient rapporter des sommes non négligeables à leur détenteur, mais il est difficile aujourd’hui de calculer leurs produits. Les familles paient les actes civils (plainte, scellés après décès, ouverture de porte…). Les commissaires sont ensuite censés mettre en commun la moitié des sommes perçues. On sait exactement combien Chénon fils verse chaque mois à la Bourse commune de la Compagnie. Pour les autres commissaires étudiés, il faut procéder à une estimation à partir du nombre d’actes civils de chaque type – sans savoir si l’acte a bien été payé. En effet, tous – en particulier Chénon fils – soulignent à quel point il peut être difficile de toucher son dû.

Il n’est guère possible de tirer des conclusions fermes : les revenus varient énormément, selon l’année, le mois et le commissaire ; ce sont les scellés après décès qui rapportent le plus, ce qui explique qu’ils soient très convoités.

Chapitre IV
Le quartier du Louvre, quatrième quartier de police

Le quartier du Louvre-Saint-Germain-l’Auxerrois a une image ambivalente chez les contemporains comme Restif de la Bretonne. Derrière les façades de la rue Saint-Honoré, ses boutiquiers respectables et ses honnêtes bourgeois, se cachent des petites rues où abondent prostituées et tripots. Entre le Louvre et le Pont-Neuf, les quais et leurs revendeuses sont au carrefour de la revente et du recel.

Comment les commissaires percevaient-ils leur quartier ? Hommes de terrain, ils sont particulièrement bien placés pour connaître leur ressort et leurs administrés. Quelques sources en donnent une idée, par exemple quand le lieutenant général de police fait appel à « l’ancien » pour le tirage de la milice en 1743, ou pour la création de « cantons » et d’« arrondissements » à l’occasion de la réforme de Turgot en 1776.


Deuxième partie
Des commissaires et leurs pratiques


Que faisait au juste un commissaire au Châtelet ? L’édit de création de la lieutenance de police à Paris, en mars 1667, confirmait la diversité des tâches attribuées à la police, chargée tout à la fois d’« assurer le repos du public et des particuliers, purger la ville de ce qui peut causer les désordres, procurer l’abondance et faire vivre chacun selon sa condition et son devoir ». Comment les commissaires s’acquittaient-ils de fonctions aussi diverses ? Comment pratiquaient-ils quotidiennement leur métier ?

Chapitre V
Des tâches multiples et diverses

Les traités des commissaires Delamare et Lemaire, au début et à la fin du xviiie siècle, énumèrent la longue liste de leurs sphères d’intervention : religion, mœurs, sûreté, santé publique, approvisionnement, marchés, denrées, voirie, cimetières, sciences et arts, commerce, manufactures, domestiques et ouvriers, pauvres et mendiants, animaux, hôpitaux et asiles, sans compter les missions de police criminelle, ou encore les actes civils. Tournées régulières d’inspection, patrouilles dans Paris et ses faubourgs… toutes ces tâches ne dispensent pas de rester disponible pour recevoir plaignants, victimes et accusés. Il en résulte, pour un commissaire consciencieux, un emploi du temps chargé et difficile à organiser entre flagrants délits et vacations pour des scellés après décès ou des informations. À de multiples reprises, les contemporains soulignent, pour mieux le déplorer, l’absentéisme des commissaires. De leur côté, ces derniers se disent surchargés. Qu’en est-il concrètement ? En réalité, la situation diffère énormément selon les commissaires, et les deux extrêmes se retrouvent, du « nonchalant » au « zélé ». Cadot travaille peu, produit peu d’actes, il est souvent absent. Chénon père, quant à lui, semble doué d’ubiquité et réussir à tout mener de front en privilégiant les spécialités confiées par le lieutenant général. L’activité de Chénon fils est beaucoup plus équilibrée, plus « généraliste ». En fait, les commissaires du quartier du Louvre semblent se répartir les tâches. Pierre Chénon traite surtout de vols pour lesquels il a affaire aux inspecteurs et aux revendeuses du Pont-Neuf – ses meilleures indicatrices. Louis Cadot, lui, reçoit surtout des plaintes. On remarque parmi les affaires traitées par Chénon fils davantage de morts violentes que chez ses confrères.

Chapitre VI
La pratique quotidienne

Pour faire face à la multiplicité de ses tâches, un commissaire efficace s’appuie sur un emploi du temps et surtout un hôtel bien organisés. La pratique quotidienne repose en premier lieu sur ses clercs. Ceux-ci ne sont pas uniquement des « petites mains » chargées de l’expédition des actes et de la gestion des archives. Certains se révèlent des collaborateurs précieux. Présents à l’hôtel, ils pallient l’absence du commissaire et le suppléent ou le remplacent au besoin pour des levées de scellés… Si ces personnages restent souvent anonymes, l’étude des archives de Pierre Chénon permet de sortir l’un d’entre eux de l’ombre. Cheirouze, son maître clerc, est une pièce maîtresse dans sa réussite professionnelle.

Chapitre VII
Derrière le policier, le magistrat ?

L’écrit tient une place considérable dans la pratique du métier. Un bon magistrat doit savoir faire parler et écouter ses visiteurs, qu’ils soient venus volontairement ou non. Certes, les mots sont figés, et la parole filtrée par l’écrit. Mais la lecture de ces sources nous apprend beaucoup sur les visiteurs et sur les commissaires eux-mêmes. Ainsi, les motivations des plaignants ne sont plus les mêmes à la veille de la Révolution qu’en 1750. Au lieu de faire appel à la police en dernier recours, on commence par faire appel au commissaire, de façon à faire pression sur le coupable que l’on désigne, quitte à abandonner ensuite les poursuites. Ce mécanisme parajudiciaire est par exemple souvent utilisé par les femmes séduites et abandonnées. Le commissaire joue pour ainsi dire le rôle d’un médiateur et incarne une figure tutélaire dans son quartier.

Chapitre VIII
Aire et sphère d’influence des commissaires du Louvre

Les lieutenants généraux de police, dans un souci d’efficacité et de rationalisation de l’administration, souhaitent que les Parisiens se rendent chez le commissaire le plus proche de leur domicile, à savoir un des commissaires de leur quartier. Pourtant, les exceptions sont encore nombreuses à la fin du xviiie siècle. Certains plaignants préfèrent traverser la capitale pour se rendre chez un commissaire en particulier. Pourquoi ? Les raisons semblent tenir tant à la personne du visiteur qu’à la réputation du magistrat, comme le montre une étude croisée des adresses et des métiers des plaignants et de la nature des affaires. À l’exception des femmes ou des domestiques portant plainte contre leur mari ou contre leur maître et qui cherchent, par une prudence bien compréhensible, à s’éloigner de leur domicile, ce sont les plaignants les plus riches qui vont voir le commissaire de leur choix. Chénon père paraît s’être constitué une solide réputation auprès des bourgeois de Paris et des négociants qui viennent lui soumettre leurs lettres de change frauduleuses. Quel que soit le commissaire, on constate que ses plaignants, dans leur majorité, ne sont pas des habitants du quartier du Louvre, mais proviennent surtout des grands quartiers limitrophes, comme ceux du Palais-Royal ou de Montmartre. Cela peut être lié à la proximité, mais aussi au fait que ces quartiers sont en sous-effectif policier par rapport à leur densité. La réputation des magistrats joue aussi pour beaucoup, comme le montrent les nombreuses lettres que conservent les Chénon.


Troisième partie
Des commissaires dans la machine policière et judiciaire


Si les commissaires au Châtelet sont chargés de maintenir le bon ordre dans leur quartier, de recevoir les plaintes des habitants, ce ne sont pas là leurs seuls rôles. Procéduriers plutôt qu’enquêteurs, ils sont des rouages d’une machine judiciaire fort complexe et bien rôdée, un maillon dans une chaîne. Dans ce cadre, ils agissent au nom du procureur du roi et du lieutenant général.

Chapitre IX
Un auxiliaire de la machine judiciaire

Chargée de la sûreté et de l’ordre publics, du respect et de la bonne application des lois et règlements, la police est liée à la justice dont elle constitue en quelque sorte le bras séculier. Pierre Chénon, puis son fils, sont ceux qui procèdent le plus souvent à des informations à la requête du procureur du roi au Châtelet. Ils ne font pas cependant preuve d’un grand zèle pour ces missions, préférant consacrer leur temps aux affaires criminelles ou à leurs nombreuses spécialités.

Chapitre X
Un rouage de la machine policière

Les Chénon sont en réalité des hommes de confiance du lieutenant général, surtout Sartine puis Lenoir. Leurs relations semblent excellentes. Les deux hommes sont régulièrement chargés de missions délicates. En outre, le père et le fils sont, à la fin de l’Ancien Régime, des commissaires « spécialisés » dans des questions sensibles : un temps les prêts sur gages, mais surtout la librairie et la Bastille pour le père, la mendicité pour le fils.

Chapitre XI
Les relations entre commissaires

Concrètement, à quoi ressemblaient les relations entre les commissaires au Châtelet ? Gardaient-ils jalousement leurs affaires et leurs clients ? De véritables solidarités, voire des amitiés, pouvaient-elles naître et se développer au-delà du cercle de la Compagnie et des rapports professionnels ?

Des réseaux se dessinent : Cadot et Chénon père ne s’entendent pas, chacun a ses propres remplaçants qui ne remplacent pas l’autre commissaire du Louvre. Pierre Chénon n’hésite pas à faire appel à de nombreux collègues et semble faire en sorte qu’ils aient toute raison d’être satisfaits du remplacement proposé. Il est d’ailleurs apprécié par la plupart de ses confrères qui l’ont choisi plusieurs années consécutives comme syndic et comme receveur de leur Compagnie. Les lieutenants généraux de police, quant à eux, s’efforcent de réunir les quarante-huit commissaires parisiens autour d’un idéal commun, à savoir le maintien de l’ordre public.

Chapitre XII
Les relations avec les autres acteurs de l’ordre public

Vu leur excellente connaissance du terrain et leurs liens directs avec le lieutenant général de police, les inspecteurs étaient des acteurs de première importance, ce sont eux les véritables enquêteurs. La coopération avec un commissaire pouvait être très poussée : Chénon père et l’inspecteur Henry œuvrèrent ainsi ensemble pendant près de vingt ans, l’inspecteur changeant de spécialité en même temps que le commissaire pour s’occuper successivement de la répression de l’usure puis des écrits interdits.

La collaboration entre commissaires et Guet fut en revanche parfois très tendue. Chénon fils, par exemple, ne cesse de déplorer le manque d’efficacité de ces escouades, s’appliquant à mettre en lumière leur lâcheté en cas de conflit avec la population.

Chapitre XIII
L’image de la police, gage de son efficacité ?

C’est le commissaire du quartier, figure généralement respectée par les habitants, qui, le premier, intervient lors des émotions populaires pour tenter de rétablir le calme. Si les Parisiens ont une image positive de Chénon père, ils n’ont que mépris pour les hommes du Guet et de la Garde. Les commissaires Cadot et Chénon fils n’ont pas le même entregent que l’« ancien » du quartier, et ne réussissent pas aussi bien à s’imposer et à calmer les esprits échauffés.


Conclusion

Un constat s’impose : il n’y a pas « un modèle » de commissaire de police à Paris dans la seconde moitié du XVIII e siècle. Aucun de nos quatre magistrats n’a le même parcours social et professionnel, la même « vocation », la même activité, les mêmes clients, les mêmes informateurs, la même conception du métier, la même manière d’exercer son art, le même talent, les mêmes qualités. Ils n’entretiennent pas les mêmes contacts avec leurs administrés, leur hiérarchie, leurs collègues ou les autres officiers de la machine judiciaire… Certains, comme Pierre Chénon et son fils, réussissent d’ailleurs à mettre ces différences à profit pour tendre, en se complétant l’un l’autre, à une plus grande efficacité, et ainsi répondre aux demandes du bien commun, l’idéal de cette « bonne police » qu’ils partagent avec un Delamare, un Lemaire, un Sartine ou un Lenoir.


Annexes et pièces justificatives

Reconstitutions généalogiques et extraits d’actes notariés. — Liste des faire-part reçus et conservés par le commissaire Chénon père. Tableaux récapitulatifs : carrières, estimations des revenus.

Le quartier du Louvre vu par ses commissaires : le tirage de la milice (1743) ; les échoppes du quai de l’École (1783) ; le découpage du quartier en arrondissements (1776).

Tableaux synthétiques : types d’affaires traités par les commissaires, nombre d’actes. Essais de reconstitution de leurs emplois du temps. Cartes de leurs déplacements et de l’origine géographique de leurs visiteurs par quartier. Statistiques concernant les professions des plaignants.

Tableaux des délais mis pour obtempérer aux demandes d’informer du procureur du roi au Châtelet ; statistiques concernant la librairie, la mendicité dans l’activité de Chénon père et Chénon fils. Liste des personnes « travaillant à la police » citées par les commissaires ; tableau des remplacements des commissaires du Louvre par un confrère.