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École des chartes » thèses » 2003

Benjamin Aubery du Maurier (1566-1636), ambassadeur protestant du Très Chrétien

« Craindre dieu et servir le roi ».


Introduction

Malgré une carrière honorable au service des Réformés puis d’Henri IV et de Louis XIII, Benjamin Aubery, seigneur du Maurier, reste un inconnu. Pourtant, ce protestant, fils d’un paysan aisé du Maine, connut une ascension sociale remarquable qui lui permit d’acquérir la noblesse, puis de devenir ambassadeur du roi aux Provinces-Unies et conseiller d’Etat. Il était donc intéressant d’étudier, par le biais de la carrière politique et diplomatique de Benjamin Aubery, les mécanismes de la faveur et de la réussite à la Cour du roi, à l’aube du Grand Siècle. Mais, pour comprendre les motivations des actes du courtisan et de l’ambassadeur, il était nécessaire de tracer le portrait d’un homme profondément marqué par la théologie calviniste et les troubles de Religion, qui sut concilier l’obéissance à Dieu et le service du Roi, puis tenta de transmettre ces valeurs capitales à ses enfants.


Sources

Les sources concernant la vie, la carrière et la personnalité de Benjamin Aubery sont nombreuses. Sur le plan professionnel, les dépêches diplomatiques de son ambassade à La Haye, de 1613 à 1624, sont conservées en quasi totalité au département des manuscrits occidentaux de la Bibliothèque nationale de France (fr. 15955-15959). Sur le plan personnel, les Mémoires inédits de Benjamin Aubery, conservés à la Médiathèque de Poitiers, se sont révélés une source exceptionnelle, par les informations qu’ils fournissent et en raison du sens du récit et de la sensibilité de l’auteur. De nombreuses séries des Archives nationales ont été dépouillées avec profit : sous-séries R 2 (papiers des ducs de Bouillon) et 120 AP (papiers de Sully), Minutier central (en particulier études XLI, XLIX et LXXIII), archives du Conseil privé (V6 ) et du Parlement (X1A ). A la Bibliothèque nationale de France, le Cabinet des titres et les nombreuses correspondances littéraires et diplomatiques impliquant ou concernant Benjamin Aubery ont apporté de nombreuses informations. Les archives du ministère des affaires étrangères, à Paris, et de l’Algemeen Rijksarchief, à La Haye, ont permis de compléter les dépêches diplomatiques de Benjamin Aubery. Il faut enfin y ajouter les ressources des archives départementales de la Sarthe, du Maine-et-Loire et de la Vienne.


Première partie
Du Maine à Paris, les débuts d’une ascension sociale


Chapitre premier
Les origines

L’obscurité de la famille Aubery au xvie  siècle, avant la naissance de Benjamin Aubery en 1566, ne permet guère d’être catégorique. Néanmoins, les Aubery n’étaient nullement originaires d’Angleterre, comme une légende familiale tendait à l’affirmer. Il n’a pas été possible de remonter au-delà des années 1500, mais il apparaît que les Aubery, membres de la paysannerie aisée du Maine et de l’Anjou, commencèrent leur ascension sociale à la faveur du « beau xvie  siècle ». Jacques Aubery, grand-oncle de Benjamin Aubery, est la preuve de cette évolution : avocat au parlement de Paris, il eut l’honneur d’être l’avocat du roi dans l’affaire du massacre des Vaudois, en 1550-1551. Henri II récompensa le zèle de son avocat par la charge de lieutenant civil au Châtelet. La carrière de Jacques Aubery démontre donc le passage réussi de la paysannerie vivant noblement à la robe parisienne. Benjamin Aubery, destiné à suivre les traces de son grand-oncle, mais élevé dans le calvinisme, fut détourné de la robe par les guerres de Religion. Contraint de se convertir ou de s’exiler en 1585, Benjamin Aubery rejoignit les troupes du roi de Navarre. C’est ainsi qu’il participa à la bataille de Coutras, en 1588. L’année suivante, il entrait au service de Duplessis-Mornay, l’un des principaux conseillers d’Henri IV.

Chapitre II
Au service des réformés (1588-1606) : un pari risqué ?

De 1588 à 1592, Benjamin Aubery fut le secrétaire de Duplessis-Mornay, qu’il quitta pour devenir le secrétaire et l’intendant d’Henri de La Tour, vicomte de Turenne et duc de Bouillon, de 1592 à 1606. Ces deux choix montrent l’attachement d’Aubery à la cause réformée, ainsi que l’importance des relations de fidélité, à la fin des guerres de Religion. Mais l’exemple de Benjamin Aubery souligne combien ces relations d’homme à homme pouvaient différer en fonction des personnalités et des circonstances. En effet, dans le premier cas, l’attitude paternelle de Duplessis-Mornay vis-à-vis de son protégé transforma une relation de fidélité en un lien d’amitié fort, qui ne prit fin qu’en 1623, à la mort du « Pape des Huguenots ». C’est pour obéir à son maître que Benjamin Aubery entra en 1592 au service du duc de Bouillon, plus à même de favoriser l’ascension d’un jeune homme talentueux. Malheureusement, Aubery ne réussit pas à se concilier la faveur de Bouillon, malgré les importantes fonctions politiques et financières qu’il occupait. L’incompatibilité de leurs caractères et leurs divergences concernant le service du roi apparurent au grand jour lors de l’« affaire Bouillon » (1602-1606), au cours de laquelle le duc défia l’autorité du roi. Cette crise provoqua la rupture d’un lien de fidélité qui, au lieu de favoriser la carrière d’Aubery, avait failli le perdre dans l’estime d’Henri IV. Benjamin Aubery se tourna alors définitivement vers le service du roi.

Chapitre III
« M’employer honorablement pour le service du roi » : un choix judicieux

Benjamin Aubery avait eu l’habileté, en même temps qu’il servait Duplessis-Mornay puis Bouillon, de devenir un fidèle du roi de France. Le phénomène était alors courant, bien qu’un fidèle dût, en théorie, se vouer corps et âme à son maître. Si Aubery n’avait guère eu de peine à concilier le service de Duplessis-Mornay avec celui du roi, il n’en fut pas de même avec le duc de Bouillon. C’est pourtant grâce à sa proximité avec ses deux maîtres qu’il réussit à entrer dans l’entourage du roi, puis à gagner sa confiance. D’abord secrétaire ordinaire du roi de Navarre en 1590, Aubery fut ensuite chargé d’une ambassade extraordinaire en Angleterre, en 1592. Il rédigea également plusieurs panégyriques en l’honneur du roi. Lors de l’affaire Bouillon, le roi et ses conseillers surent gré à Du Maurier de ses efforts pour ramener Bouillon sur le chemin de l’obéissance.

Tout cela joua en faveur de Benjamin Aubery. En 1607, le roi offrit à Aubery un office de notaire et secrétaire du roi, puis Sully lui proposa de travailler sous ses ordres. D’abord chargé des subsides versés aux Provinces-Unies, alliées de la France dans la lutte contre l’Espagne, Benjamin Aubery devint ensuite un des secrétaires de Sully, sous le titre de « contrôleur général des restes des états du Conseil ». Il s’agissait de vérifier les comptes de l’administration des finances depuis l’avènement d’Henri IV et d’y découvrir d’éventuelles malversations. Jusqu’en 1610, Benjamin Aubery connut une faveur croissante de la part du roi et de son ministre. Le geste de Ravaillac faillit être fatal à la carrière de du Maurier. Il marqua en tout cas un coup d’arrêt important dans son ascension, puisque Benjamin Aubery connut la disgrâce pendant trois ans, avant de retrouver la faveur de Marie de Médicis et de Villeroy.


Deuxième partie
« Le roi mon maître » Du Maurier ambassadeur de France aux Provinces-Unies (1613-1624)


Chapitre premier
La diplomatie française à l’aube du grand siècle

L’étude du fonctionnement de la diplomatie française au début du xviie  siècle, ainsi que de l’alliance traditionnelle entre la France et les Provinces-Unies, est un préalable indispensable à la bonne compréhension de l’ambassade de du Maurier. Le fonctionnement du secrétariat d’Etat des affaires étrangères restait, sous le règne d’Henri IV puis de Louis XIII, artisanal : administration centrale peu nombreuse et faiblement structurée, représentants du roi à l’étranger en petit nombre et à la formation hétérogène, moyens modestes, connaissance parfois superficielle (et en tout cas stéréotypée) du pays où les ambassadeurs séjournaient et négociaient… Les dépêches diplomatiques de Benjamin Aubery montrent toutefois que celui-ci s’intéressa à l’histoire, aux institutions et à la culture des Provinces-Unies. Les liens étroits noués depuis les années 1560 entre la France et les Provinces-Unies facilitèrent sans doute cette familiarisation. Une alliance avait d’abord existé entre les Huguenots français et les « Gueux de la mer » puis, à l’appel des Etats-Généraux, le duc d’Anjou avait tenté d’imposer son autorité sur les provinces en lutte contre le roi d’Espagne. Enfin, l’avènement du protestant Henri IV avait permis la conclusion d’une alliance offensive et défensive entre les deux pays. Cette alliance était encore en vigueur en 1613, à l’arrivée de Benjamin Aubery à La Haye.

Chapitre II
Représenter et informer le roi

Le travail d’un ambassadeur consistait avant tout à représenter le roi, à parler et à agir en son nom. Les notions de cérémonial et d’étiquette, au cœur de tous les gestes d’un ambassadeur en public, ne doivent donc pas être sous-estimées, en particulier dans le cas des Provinces-Unies, jalouses de leur récente souveraineté. A La Haye, les audiences accordées par les Etats-Généraux étaient les principales cérémonies officielles, mais les conversations privées des ambassadeurs avec le stathouder, Maurice de Nassau, et le grand pensionnaire, Johan van Oldenbarnevelt, revêtaient également une grande importance. Enfin, Benjamin Aubery devait se concilier la faveur des députés des provinces et des proches du stathouder.

Malgré les institutions républicaines des Provinces-Unies, le travail quotidien de Benjamin Aubery ne différait pas véritablement de celui de ses collègues. « Honorable espion », il devait, pour informer le roi de France le mieux et le plus rapidement possible, faire preuve d’habileté, mais aussi construire un réseau d’informateurs fiables, chargés de surveiller les agissements des dirigeants néerlandais et des autres ambassadeurs en poste. Aux Provinces-Unies, la surveillance s’étendait également aux ports et aux armées, en particulier aux troupes françaises, en raison des révoltes nobiliaires et des guerres de religion qui fragilisaient alors la France. Enfin, un bon ambassadeur devait, en même temps qu’il informait Paris, se tenir informé des événements de la Cour. Deux réseaux d’informateurs étaient donc nécessaires, l’un à Paris, l’autre à La Haye.

Chapitre III
Conserver l’amitié de La Haye tout en gagnant celle de Madrid (1613-1617)

Négocier : pour quoi ?  — Pendant l’ambassade de du Maurier, les subsides de la France et l’entretien des troupes françaises stationnées aux Provinces-Unies firent constamment l’objet de négociations. Les sommes en jeu, très importantes, étaient en effet à la fois un moyen de pression de la France sur son allié et une difficulté pour les finances royales, mises à mal par les révoltes nobiliaires. Cependant, subsides et troupes françaises n’étaient que la traduction matérielle de la stratégie diplomatique française. L’essentiel, pour Benjamin Aubery, consistait à soutenir les Provinces-Unies dans leur lutte contre l’Espagne, y compris pendant la Trêve (1609-1621). En réalité, les problèmes financiers et militaires dissimulaient la question du maintien de l’équilibre entre les Bourbons et les Habsbourgs, ainsi que la crainte de l’hégémonie espagnole. Le rôle de Benjamin Aubery fut donc déterminant dans le maintien de l’équilibre européen, bien qu’il penchât personnellement pour une politique plus ferme vis-à-vis de Madrid.

Le temps de l’entente cordiale (1613-1617).  — Les premières années de l’ambassade de du Maurier virent la poursuite de l’alliance franco-néerlandaise. Après des débuts difficiles (il avait reçu l’ordre d’obtenir le rappel de François d’Aersens, ambassadeur des Provinces-Unies à Paris, qui ne donnait plus satisfaction à la régente), du Maurier sut se faire apprécier des Etats-Généraux et du stathouder. La querelle de la succession de Clèves et de Juliers, ouverte en 1609 et en partie résolue par le traité de Xanten en 1614, fut l’occasion pour la France de confirmer son soutien à La Haye, tandis que les Etats-Généraux se déclaraient prêts à aider Louis XIII dans sa lutte contre les révoltes nobiliaires.

Chapitre IV
Du Maurier confronté à une « estrange revolution d’affaires »

La bonne entente franco-néerlandaise commença à se dégrader en 1617, pour des raisons religieuses et politiques. Un conflit politique entre Maurice de Nassau et Barnevelt, les deux principaux dirigeants du pays, se greffa sur la querelle à propos de la prédestination qui opposait Gomaristes et Arminiens. Ce conflit eut des répercutions dans tout le pays : troubles, manifestations, évictions de magistrats… La diplomatie fut d’autant moins épargnée que la France prit parti pour Barnevelt et les Arminiens, alors même que la victoire se dessinait nettement en faveur de leurs adversaires. L’action de Benjamin Aubery à La Haye perdit toute efficacité politique : le soutien de Louis XIII à Barnevelt, emprisonné et accusé de haute trahison, retarda mais n’empêcha pas l’exécution de celui-ci en mai 1619. De 1618 à 1621, la méfiance et le soupçon dominèrent donc les relations franco-néerlandaises. Benjamin Aubery, qui avait pourtant demandé son rappel mais à qui le roi et ses ministres conservaient leur confiance, pâtit de cette situation, tout comme les marins et armateurs français, malmenés par la Vereenidge Oost-Indische Compagnie, qui souhaitait conserver le monopole du commerce avec les Indes orientales. De son côté, la France prit des mesures de rétorsion à l’encontre des navires néerlandais. Ces différends commerciaux empêchèrent toute négociation politique pendant plusieurs années, alors même que la fin de la Trêve entre Madrid et La Haye approchait.

Chapitre V
De Barnevelt à Richelieu, ou les ambiguïtés de la diplomatie française aux provinces-unies (1619-1624)

Malgré la crise de 1619, la France et les Provinces-Unies restaient officiellement alliées. Dans les faits, les relations des deux pays furent glaciales jusqu’en 1621 au moins. Le rôle de Benjamin Aubery dans cette affaire fut capital, en raison de son ressentiment vis-à-vis de Maurice de Nassau et de l’humiliation subie par le roi en 1619. Pourtant, dans son esprit comme dans celui des ministres français (les Brulart essentiellement), réapparut le spectre de l’hégémonie espagnole, si la guerre hispano-néerlandaise reprenait sans que Paris intervînt en faveur de La Haye. La diplomatie française, partagée entre l’indifférence de Luynes, l’attentisme des Brulart et l’activisme de la reine-mère, resta longtemps hésitante, mais les revers militaires néerlandais, après la reprise des hostilités avec l’Espagne (1622), contribuèrent au retournement diplomatique de la France. La contribution de du Maurier, essentielle, permit de régler plusieurs différends commerciaux, de renouer des liens de confiance avec les Etats-Généraux et d’envisager une nouvelle alliance. Ainsi, en préparant les conditions d’un rapprochement politique et militaire entre Paris et La Haye, Benjamin Aubery renouait avec la stratégie d’alliances protestantes d’Henri IV, que Richelieu allait, dans une large mesure, reprendre.


Troisième partie
Un « homme de bien » au début du xviie  siècle


Chapitre premier
Un homme de foi cultivé

Les Mémoires et la correspondance de Benjamin Aubery sont les sources privilégiées qui permettent de mieux connaître sa personnalité, sa culture et sa foi. Malgré la construction littéraire inhérente à ce type de sources, Aubery apparaît comme un homme honnête, fidèle et franc. Il était en revanche chicaneur et rancunier lorsque ses intérêts ou son honneur étaient bafoués. C’est surtout la foi de Benjamin Aubery qui semble avoir façonné son caractère et guidé ses actes : protestant fervent, il refusa toujours de se convertir. S’il connut des moments de doute, comme l’attestent sa correspondance et ses œuvres poétiques, il retrouva toujours le chemin de Dieu. Fortement imprégné par la théologie calviniste, il avait fait sienne la mentalité de minorité des protestants français, ce qui le conduisait à prôner la modération à l’égard des autres religions. Enfin, Benjamin Aubery fit partie de la République des Lettres. Sa formation, sa carrière aux Provinces-Unies, grand centre intellectuel du temps, et les amitiés qu’il noua avec le président de Thou, Peiresc, Grotius ou les frères Dupuy expliquent la présence d’un diplomate dans ce cercle européen d’érudits. Lecteur assidu des Anciens (Horace, Plaute, Sénèque…) et des Modernes (Duplessis-Mornay, Scévole de Sainte-Marthe, Pétrarque…), mémorialiste de talent, il fut également épistolier et poète.

Chapitre II
Du Maurier père et homme d’affaires

Placé de facto en marge d’une société majoritairement catholique, Benjamin Aubery fut conduit à nouer des relations étroites, mais pas exclusives, avec la communauté protestante, en particulier parisienne. Mariages et parrainages permettaient de construire un réseau de parenté solide que des actes économiques (constitutions de rentes, lettres de change, vente ou achat de terres…) renforçaient. Du Maurier eut ainsi des relations étroites avec des familles importantes de la robe protestante parisienne, telles que les Marbault, les Madelene, les Guéribalde ou les Du Candal. Par ailleurs, le mariage de Benjamin Aubery avec Renée de Jaucourt lui permit de nouer des contacts avec la noblesse d’épée qui devaient se révéler fort utiles à ses enfants.

La constitution et la gestion d’un patrimoine mobilier et foncier faisaient également partie des préoccupations de du Maurier. Dans ce domaine, le service du roi lui permit d’accroître considérablement ses biens, limités à l’origine à quelques terres dans le Maine, et qui atteignirent, à sa mort, plus d’un demi-million de livres. Après de modestes acquisitions foncières, Benjamin Aubery investit essentiellement dans des obligations et des constitutions de rentes (45% de sa fortune totale). La culture, la sociabilité et la fortune de Benjamin Aubery révèlent donc un « homme de bien » qui, malgré son anoblissement, resta un homme de plume et un robin, préoccupé par le service de Dieu, l’obéissance au roi et l’éducation de ses enfants.

Chapitre III
Les aubery du Maurier après la mort du « fondateur »

Sept des onze enfants de Benjamin Aubery survécurent à leur père, mort en 1636. Le testament de celui-ci prescrivait un partage égalitaire et provoqua une querelle de succession qui fut réglée à l’amiable à l’avantage de l’aîné. Malgré l’éducation robine qu’Aubery avait voulue pour ses fils, ceux-ci firent tous le choix de l’épée, ou du moins de la noblesse campagnarde, tandis que ses filles se marièrent dans la noblesse d’épée. Sur le plan religieux, cinq des sept enfants demeurèrent protestants jusqu’à leur décès et tentèrent de transmettre leur religion à leurs descendants. Pour ces derniers, la Révocation provoqua un cas de conscience que Benjamin Aubery avait pressenti dès les années 1620. Certains, opiniâtres, se résolurent à l’exil, en particulier aux Provinces-Unies, pendant que leurs cousins se convertissaient. Ce fut notamment le cas de la branche aînée des Aubery du Maurier qui, devenus bons catholiques, adoptèrent au XVIII e  siècle la carrière militaire et la mentalité des nobles d’épée.


Conclusion

D’abord homme de l’ombre, Benjamin Aubery comprit rapidement que seul le roi, y compris en période de minorité, était à même de récompenser les hommes ambitieux et efficaces. Il accomplit donc une superbe carrière, marquée par son anoblissement et par une ambassade prestigieuse qui démontra ses talents de négociateur et sa fidélité inébranlable. Les difficultés rencontrées en 1619 et les hésitations de la diplomatie française ne l’empêchèrent pas de défendre constamment le principe des alliances protestantes. Si du Maurier fut l’un des premiers à comprendre le danger représenté par la puissance commerciale et politique croissante des Provinces-Unies, il considérait toutefois l’alliance néerlandaise comme un préalable nécessaire à la guerre contre l’Espagne, dont il était partisan. La politique étrangère qu’il prônait fait donc de lui un précurseur de Richelieu. L’étude des relations franco-néerlandaises permet également de réhabiliter, au moins en partie, la diplomatie de Villeroy et des Brulart. Enfin, malgré la vie de Cour qui autorisait toutes les compromissions, Benjamin Aubery ne se départit jamais de l’habit de l’homme de bien. Homme de conviction et de foi, il tenta d’inculquer ces valeurs à ses descendants. Si certains se rallièrent au catholicisme, tous firent le choix du service du roi, qui leur permit de poursuivre l’ascension sociale engagée par leur ancêtre.


Pièces justificatives

Actes notariés. ­ Correspondance personnelle et professionnelle de Benjamin Aubery. ­ Dépêches diplomatiques (transcription et fac-similés). ­ Accord commercial entre la France et les Provinces-Unies (1623). ­ Préambule des Mémoires et méditation sur le Deutéronome de Benjamin Aubery.


Annexes

Tableau synoptique. ­ Lexiques cryptés employés lors de l’ambassade de du Maurier. ­ Etat des sommes reçues du roi par Benjamin Aubery au cours de sa carrière. ­ Cartes. ­ Généalogies.


Iconographie

Portraits. ­ Gravures et photographies des châteaux de Benjamin Aubery. ­ Fac-similés extraits du manuscrit des Mémoires de du Maurier.